Au cœur des Balkans, les tensions entre le Kosovo et la Serbie ne semblent pas près de s’apaiser. Dernier épisode en date : la fermeture par les autorités kosovares d’un bureau de l’administration fiscale serbe à Mitrovica, dans le nord du pays. Une décision qui s’inscrit dans une série de mesures visant à démanteler ce que Pristina considère comme des institutions parallèles serbes opérant illégalement sur son territoire.
Des institutions parallèles dans le viseur
Selon une source proche du dossier, le bureau fermé mercredi matin était soupçonné de collecter illégalement des fonds auprès de citoyens et d’entités vivant et opérant au Kosovo. Une pratique inacceptable aux yeux de Pristina, qui n’a pas hésité à intervenir malgré les vives critiques de Belgrade.
Cette opération coup de poing n’est pas un cas isolé. Ces derniers mois, le gouvernement kosovar a multiplié les actions pour mettre fin aux activités des institutions serbes sur son sol : fermeture de bureaux de poste, de banques, interdiction de l’usage du dinar serbe… Autant de décisions unilatérales qui témoignent de la détermination de Pristina à affirmer sa souveraineté.
Belgrade dénonce une « violation brutale » des droits
Sans surprise, la réaction de la Serbie ne s’est pas fait attendre. Belgrade a vivement critiqué l’expulsion d’environ 80 employés de l’administration fiscale, y voyant une « violation brutale de leurs droits fondamentaux, y compris le droit au travail ». Une rhétorique qui illustre les profondes divergences entre les deux pays, plus de 25 ans après la guerre du Kosovo.
Un test pour la politique d’Albin Kurti
Cette nouvelle escalade intervient à un moment clé pour le Premier ministre kosovar, Albin Kurti. À un mois des élections législatives, sa politique de fermeté vis-à-vis de la Serbie sera scrutée de près. Depuis son arrivée au pouvoir, il a multiplié les bras de fer avec Belgrade, prenant des décisions unilatérales destinées à asseoir l’autorité de Pristina :
- Bannissement du dinar serbe
- Fermeture d’administrations parallèles serbes
- Obligation pour les Serbes du Kosovo d’avoir un permis de conduire kosovar
- Interdiction de conduire des voitures immatriculées en Serbie
Autant de mesures prises après l’échec des négociations menées sous l’égide de l’UE et des États-Unis en 2023. Un constat d’impuisse qui a poussé Albin Kurti à durcir le ton, quitte à raviver les tensions avec le puissant voisin serbe.
Un avenir incertain pour les relations entre Belgrade et Pristina
Plus de deux décennies après la guerre qui a fait 13 000 morts, principalement des Albanais du Kosovo, les plaies peinent à cicatriser. La Serbie n’a jamais reconnu l’indépendance de son ancienne province, proclamée en 2008. Et malgré les pressions internationales, Belgrade refuse obstinément de normaliser ses relations avec Pristina.
Dans ce contexte, la fermeture du bureau de l’administration fiscale serbe à Mitrovica apparaît comme un nouveau coup porté au fragile processus de dialogue. Une escalade qui risque de compliquer encore un peu plus la recherche d’une solution durable dans cette région des Balkans, où les blessures du passé sont loin d’être refermées.
Face à cette situation explosive, la communauté internationale retient son souffle. L’UE et les États-Unis, qui jouent un rôle clé dans la médiation entre les deux pays, vont devoir redoubler d’efforts pour éviter un embrasement. Car si les tensions continuent de s’accumuler, c’est toute la stabilité de la région qui pourrait être menacée.
Une chose est sûre : tant que la Serbie et le Kosovo ne parviendront pas à surmonter leurs différends historiques, la paix dans les Balkans restera un horizon lointain. Et chaque nouvelle provocation, chaque nouvelle mesure unilatérale, ne fera que rendre cet objectif un peu plus inaccessible.
Dans ce bras de fer qui semble sans fin, c’est l’avenir de toute une région qui se joue. Un avenir suspendu aux décisions de dirigeants qui peinent à tourner la page d’un passé douloureux. Un avenir qui dépendra aussi de la capacité de la communauté internationale à apaiser les tensions et à favoriser le dialogue. Un défi immense, mais crucial pour espérer un jour voir la paix s’installer durablement dans cette partie de l’Europe.