En ce début de mandat pour Donald Trump, le Premier ministre japonais Shigeru Ishiba lui a adressé ses « félicitations chaleureuses », tout en soulignant l’importance de poursuivre la coopération nippo-américaine pour préserver « un Indo-pacifique libre et ouvert ». Dans un contexte régional tendu, Tokyo compte plus que jamais sur son allié de Washington pour assurer sa sécurité et contrer les ambitions de Pékin.
Une alliance clé pour le Japon
Dans sa lettre félicitant le magnat républicain pour son retour à la Maison Blanche, Shigeru Ishiba a « exprimé son souhait de travailler en étroite collaboration pour renforcer davantage les relations entre le Japon et les États-Unis et pour réaliser un Indo-pacifique libre et ouvert », rapporte un communiqué officiel. Sur le réseau social X (ex-Twitter), le dirigeant nippon s’est aussi dit « réjoui » à l’idée de « collaborer » avec Donald Trump « pour renforcer le partenariat durable » unissant les deux pays.
Et pour cause : avec environ 54 000 militaires américains stationnés sur son sol, le Japon reste très dépendant de son allié pour assurer sa défense. En contrepartie, l’archipel constitue un maillon essentiel du dispositif de Washington dans la région Asie-Pacifique. Une zone où les tensions se multiplient, notamment du fait de l’affirmation de la puissance chinoise.
Le spectre d’un conflit sino-taïwanais
Principal sujet d’inquiétude pour Tokyo : le renforcement continu des capacités militaires de Pékin, qui intensifie sa présence autour de territoires contestés et n’exclut pas de s’emparer par la force de Taïwan, île que la Chine considère comme une province renégate. Un scénario catastrophe pour le Japon.
L’Ukraine d’aujourd’hui pourrait être l’Asie de l’Est de demain.
Shigeru Ishiba, à propos des risques d’une invasion chinoise de Taïwan
Début octobre, peu après son arrivée au pouvoir, le Premier ministre nippon avait ainsi estimé que « l’Ukraine d’aujourd’hui pourrait être l’Asie de l’Est de demain » si la Chine décidait d’attaquer Taïwan. Un conflit qui impliquerait inévitablement le Japon et les États-Unis, liés par un traité de sécurité.
La Corée du Nord, autre menace immédiate
Autre sujet de préoccupation pour Tokyo et Washington : la Corée du Nord, qui multiplie les essais de missiles balistiques et se rapproche de plus en plus de la Russie. Mi-janvier, Pyongyang a encore tiré plusieurs missiles à courte portée, une semaine après avoir affirmé avoir testé un nouveau « missile hypersonique ».
Face à ces défis sécuritaires, le Japon n’a d’autre choix que de s’en remettre à la protection américaine, tout en s’efforçant lui-même de muscler ses capacités de défense. Tokyo augmente ainsi ses dépenses militaires depuis plusieurs années, avec l’objectif ambitieux d’atteindre 2% de son PIB d’ici 2027, contre environ 1% actuellement.
Défis économiques et incertitudes
Mais le retour de Donald Trump à la Maison Blanche fait aussi peser des incertitudes sur la relation bilatérale. Lors de son premier mandat, le milliardaire avait fait pression sur les alliés des États-Unis, Japon compris, pour qu’ils augmentent significativement leur contribution financière au budget de la défense. Cette fois, il brandit la menace de hausses de droits de douane tous azimuts, y compris visant des pays amis comme le Japon.
Les liens économiques nippo-américains ont déjà été malmenés récemment, suite à la décision de l’administration Biden de bloquer le rachat de l’aciériste U.S. Steel par son concurrent japonais Nippon Steel pour des motifs de « sécurité nationale ». Un coup dur pour la coopération industrielle entre les deux pays.
Maintenir une coopération tripartite indispensable
Lors de sa dernière tournée asiatique en janvier, le secrétaire d’État Antony Blinken avait pourtant souligné la nécessité de préserver l’étroite coopération tripartite liant Séoul, Tokyo et Washington. Un axe jugé indispensable pour contrer les visées expansionnistes de la Chine et garantir la stabilité dans la région.
Malgré ces zones d’ombre, une source proche du dossier assure que le Japon et les États-Unis ont conscience de l’importance stratégique de leur alliance et sont déterminés à l’approfondir. Le Premier ministre Ishiba espère ainsi pouvoir rapidement s’entretenir avec le président Trump pour réaffirmer la solidité du partenariat nippo-américain dans cette région Indo-pacifique sous haute tension.