Alors que la Syrie connaît un changement de régime majeur après plus d’une décennie de conflit, le mouvement libanais Hezbollah, allié de longue date du gouvernement de Bachar al-Assad, se retrouve face à une situation inédite et pleine d’incertitudes. Lors de son premier discours télévisé depuis la chute du président syrien, le chef du Hezbollah, Naïm Qassem, a exprimé son souhait de voir les nouvelles autorités syriennes maintenir une position ferme vis-à-vis d’Israël, ennemi juré du groupe pro-iranien.
Un nouveau pouvoir en Syrie, source d’inquiétude pour le Hezbollah
Le renversement du régime de Bachar al-Assad par une coalition rebelle dominée par le groupe islamiste sunnite radical Hayat Tahrir al-Sham (HTS) le 8 décembre dernier a profondément modifié le paysage politique syrien. Ce changement soudain suscite des interrogations quant à la position qu’adoptera le nouveau pouvoir envers Israël, avec qui la Syrie est techniquement en état de guerre depuis des décennies.
Pour le Hezbollah, qui a apporté un soutien militaire conséquent au régime de Bachar al-Assad pendant le conflit syrien, l’arrivée au pouvoir des rebelles représente un défi de taille. Le chef du mouvement libanais a ainsi déclaré espérer que les nouvelles autorités syriennes considèreront Israël comme un ennemi et s’abstiendront de normaliser leurs relations avec l’État hébreu.
Une incursion israélienne dénoncée, mais une Syrie « épuisée » par la guerre
La situation s’est encore complexifiée lorsque, dans la foulée du changement de régime, les troupes israéliennes sont entrées dans la zone tampon séparant les deux pays, une action qualifiée de « violation » de l’accord de désengagement de 1974 par l’ONU. Si le chef de la coalition rebelle syrienne, Abou Mouhammad al-Jolani, a dénoncé cette incursion, il a également souligné que son pays était trop « épuisé » par des années de guerre pour s’engager dans un nouveau conflit.
Parallèlement, Israël a intensifié ses frappes en territoire syrien, ciblant notamment des sites militaires à Damas et ailleurs dans le pays. Un contexte tendu qui place le Hezbollah dans une position délicate, lui qui avait décidé d’ouvrir un front contre Israël en octobre 2023 pour soutenir son allié palestinien, le Hamas, à Gaza, un conflit qui s’était mué en guerre ouverte.
Un Hezbollah affaibli et privé de son principal point de ravitaillement
Selon ses opposants au Liban et à l’étranger, cette guerre contre Israël et la chute de Bachar al-Assad ont considérablement affaibli le Hezbollah. Son chef a d’ailleurs reconnu que le mouvement ne pouvait plus, à l’heure actuelle, être ravitaillé en armes via la Syrie, qui constituait jusqu’alors sa principale voie d’approvisionnement.
De plus, dans le cadre de l’accord de trêve conclu le 27 novembre pour mettre fin aux affrontements avec Israël, le Hezbollah est tenu de retirer ses forces au nord du fleuve Litani, à une trentaine de kilomètres de la frontière israélienne, et de démanteler ses infrastructures militaires dans le sud du Liban. Un repli qui limite encore davantage sa marge de manœuvre.
Un avenir incertain pour le mouvement pro-iranien
Alors que le nouveau pouvoir en Syrie cherche à asseoir sa légitimité et à stabiliser le pays après des années de guerre civile, la question de sa relation future avec Israël reste en suspens. Si une normalisation semble peu probable à court terme au vu des déclarations des nouveaux dirigeants, un apaisement progressif des tensions n’est pas à exclure.
Pour le Hezbollah, cette nouvelle donne géopolitique représente un véritable défi. Privé de son principal allié et point de ravitaillement, contraint de se retirer du sud du Liban et affaibli par sa guerre contre Israël, le mouvement pro-iranien va devoir s’adapter à ce contexte inédit s’il veut préserver son influence régionale. Une équation complexe qui risque de peser sur son avenir et sur la stabilité du Moyen-Orient dans son ensemble.