Un espoir grandit pour les pays en première ligne face aux catastrophes climatiques. Le « fonds pour répondre aux pertes et dommages », créé lors de la dernière COP, est en passe de devenir opérationnel. Ses responsables ont annoncé mardi à Bakou que les premiers financements pourraient être débloqués dès 2025 pour soutenir les nations les plus vulnérables.
« Le fonds pour répondre aux pertes et dommages est prêt à débourser ses fonds », a déclaré son directeur exécutif, Ibrahima Cheikh Diong, lors d’une cérémonie marquant le lancement officiel de ce mécanisme très attendu. Un symbole fort dans le grand bras de fer sur le financement climatique entre pays riches et pays pauvres, au cœur des négociations de la COP29 qui se tient actuellement en Azerbaïdjan.
Un fonds crucial mais encore sous-dimensionné
Malgré cette avancée saluée par beaucoup, le chemin reste long pour répondre à l’ampleur des besoins. Pour l’heure, le fonds n’a récolté que 700 millions de dollars de promesses de dons, principalement de la part de pays développés comme l’Allemagne, la France ou le Danemark. Un montant bien en deçà des attentes.
700 millions de dollars, c’est à peu près le revenu annuel des dix joueurs de football les mieux payés au monde. Ça ne couvre même pas un quart des dommages causés par un seul ouragan comme Yagi au Vietnam en septembre dernier.
Antonio Guterres, secrétaire général de l’ONU
Un constat amer partagé par de nombreux représentants des pays du Sud, qui rappellent l’injustice fondamentale de la crise climatique. Ce sont les nations les moins responsables du réchauffement qui en subissent les pires conséquences, avec une multiplication des catastrophes dévastatrices comme les inondations, les sécheresses et les cyclones.
Indemniser les pertes, un impératif de justice
La création de ce fonds dédié, obtenue de haute lutte lors de la précédente COP en Égypte, constitue une victoire symbolique majeure pour les pays en développement. Après des années de négociations, leur revendication de longue date d’un mécanisme pour compenser les « pertes et dommages » a enfin été entendue.
Au-delà de la réparation, ce fonds incarne aussi un changement de paradigme. Il reconnaît la responsabilité historique des pays industrialisés dans le dérèglement climatique et le principe d’une dette écologique envers les pays du Sud. Un premier pas vers plus d’équité dans la gouvernance climatique mondiale.
Un fonctionnement équilibré mais des moyens limités
En un an, le fonds est passé du stade de concept à celui d’institution naissante. Basé à Manille aux Philippines, il dispose désormais d’une direction et d’un conseil d’administration où les pays en développement sont mieux représentés que dans les instances financières traditionnelles. Un gage d’équilibre salué par beaucoup, même si le choix d’un adossement provisoire à la Banque mondiale suscite des réserves.
Le principal défi reste toutefois celui des moyens. Selon certaines estimations, les pays vulnérables auraient besoin de plus de 400 milliards de dollars par an pour faire face aux impacts climatiques. Un chiffre vertigineux comparé aux maigres ressources actuelles du fonds. À l’échelle globale, la facture pourrait grimper entre 290 et 580 milliards de dollars annuels d’ici 2030, et plus encore après.
Les premiers pas d’un long combat
Pour beaucoup, le lancement de ce fonds n’est qu’une première étape. Les pays en développement réclament un effort beaucoup plus massif des nations riches, premières responsables du réchauffement, pour assumer le coût des dégâts. Ils pointent aussi la nécessité d’abonder le fonds par de nouvelles sources de financement innovantes, comme une taxe sur les énergies fossiles ou les transports aériens.
Malgré ses imperfections et ses moyens encore insuffisants, la mise en place de ce « fonds pour les pertes et dommages » reste un tournant. Il incarne l’espoir d’une justice climatique, où les pays les plus vulnérables ne seraient plus condamnés à porter seuls le fardeau d’une crise dont ils sont les premières victimes. Les débuts sont modestes, mais la voie est ouverte pour un rééquilibrage progressif. La bataille ne fait que commencer.