En 2023, la Colombie a battu un triste record, celui de la production de cocaïne. Selon un rapport conjoint du gouvernement colombien et de l’agence de l’ONU contre les drogues (ONUDC), le pays a produit pas moins de 2664 tonnes de cette poudre blanche l’an dernier, soit une augmentation vertigineuse de 53% par rapport à l’année précédente. Un chiffre qui fait froid dans le dos et qui soulève de nombreuses questions sur la capacité du pays à endiguer ce fléau.
Une production en hausse constante
Malgré les efforts du gouvernement colombien pour lutter contre le narcotrafic, force est de constater que la production de cocaïne ne cesse d’augmenter année après année. En 2023, les surfaces cultivées de coca, la plante à la base de la cocaïne, ont ainsi augmenté de 10%, s’étendant sur plus de 253 000 hectares du territoire colombien.
Cette hausse ne se limite pas à quelques régions isolées mais touche l’ensemble du pays. Pas moins de 16 des 19 départements où la présence de coca est signalée ont vu leurs surfaces de culture augmenter. Les régions les plus touchées sont le Cauca et le Nariño, dans le sud-ouest du pays, deux zones où la présence des groupes armés est forte.
Des enclaves de production prolifèrent
Le rapport s’est particulièrement intéressé à quinze enclaves de production qui concentrent à elles seules 39% de la zone de culture de coca du pays, sur seulement 14% du territoire. Un chiffre qui montre à quel point la production est concentrée dans certaines zones échappant totalement au contrôle de l’État.
Autre sujet d’inquiétude, l’apparition de nouvelles zones de culture, présentes seulement depuis 3 ans. Ces “zones d’expansion” sont localisées à 40% dans la région pauvre et isolée du Pacifique. Un terreau fertile pour les narcotrafiquants qui profitent du manque de présence de l’État pour étendre leurs activités.
Un marché en mutation
Si la production de cocaïne explose, le marché lui est en pleine mutation. Dans certaines régions, les prix des dérivés de la feuille de coca (pâte de coca et cocaïne base) atteignent des niveaux historiquement bas. Dans d’autres, il n’y a tout simplement plus de marché du fait de l’absence d’acheteurs.
Paradoxalement, cela n’empêche pas la grande majorité des cultures de coca de continuer à être récoltées. Face à ces restrictions du marché, les narcotrafiquants se sont adaptés en constituant des stocks de pâte de cocaïne et de cocaïne base, parfois utilisés comme monnaie d’échange.
Un défi majeur pour le gouvernement colombien
Face à cette situation alarmante, le gouvernement colombien se retrouve confronté à un défi de taille. Malgré les efforts déployés ces dernières années, force est de constater que les politiques mises en place n’ont pas permis d’enrayer la hausse de la production.
Nous devons repenser notre stratégie de lutte contre le narcotrafic. Les chiffres montrent que nous avons échoué et qu’il est temps de changer d’approche.
– Un haut responsable du gouvernement colombien qui a souhaité garder l’anonymat
Parmi les pistes évoquées, un renforcement de la présence de l’État dans les zones reculées du pays, un meilleur accompagnement des agriculteurs pour les aider à se tourner vers des cultures légales mais aussi une lutte accrue contre la corruption qui gangrène les institutions.
Des défis immenses pour un pays qui semble parfois dépassé par l’ampleur du problème. Car derrière ces chiffres se cache une réalité bien plus sombre, celle d’un narcotrafic qui gangrène l’ensemble de la société colombienne et déstabilise toute la région.
Un impact dévastateur sur la société
Le narcotrafic n’est pas qu’un simple trafic, c’est une véritable économie parallèle qui corrompt et violente la société colombienne au plus profond. Derrière chaque gramme de cocaïne se cachent des vies brisées, des familles détruites, des villages terrorisés par la violence des cartels.
C’est tout un pays qui vit sous la menace constante des narcotrafiquants qui n’hésitent pas à recourir à la violence la plus extrême pour contrôler leur territoire et protéger leurs affaires. Une violence qui touche en premier lieu les populations les plus pauvres et les plus vulnérables.
Mais le narcotrafic ne se contente pas de gangréner la société colombienne, il menace aussi la stabilité de toute la région. La Colombie est devenue le principal fournisseur de cocaïne du monde, inondant les marchés américains et européens de sa poudre blanche.
Une lutte à l’échelle internationale
Face à ce fléau, la communauté internationale ne peut rester les bras croisés. La lutte contre le narcotrafic est l’affaire de tous et nécessite une coopération renforcée entre les pays producteurs, les pays de transit et les pays consommateurs.
Aucun pays ne peut venir à bout seul du problème de la drogue. Nous devons unir nos forces et travailler main dans la main si nous voulons avoir une chance de gagner cette guerre.
– Une source diplomatique européenne
Cela passe par un renforcement de la coopération policière et judiciaire, un meilleur partage du renseignement mais aussi par des politiques de développement ambitieuses pour offrir des alternatives économiques viables aux populations des zones de production.
Car c’est bien là que se situe le cœur du problème. Tant que la misère et le manque de perspectives continueront à pousser les paysans colombiens dans les bras des narcotrafiquants, la production de cocaïne continuera à prospérer.
La guerre contre la drogue est loin d’être gagnée et le chemin sera long et semé d’embûches. Mais face à l’ampleur des dégâts causés par ce fléau, nous n’avons d’autre choix que de poursuivre le combat avec détermination. Pour la Colombie, pour la région, pour notre avenir à tous.