C’est un drame humain qui vient de se jouer en Méditerranée. Selon les autorités italiennes et les ONG sur place, au moins 11 personnes sont mortes et des dizaines d’autres sont portées disparues suite au naufrage de deux embarcations de migrants au large des côtes italiennes. Un lourd bilan qui relance le débat sur la crise migratoire et les politiques d’accueil en Europe.
Deux naufrages meurtriers en mer Méditerranée
C’est l’ONG allemande ResQship qui a donné l’alerte lundi. Leur navire humanitaire, le Nadir, a secouru 51 personnes en perdition sur un bateau en bois en provenance d’Afrique du Nord, près de l’île italienne de Lampedusa. Mais à bord se trouvaient aussi les corps de 10 autres personnes. Les secours ont dû utiliser une hache pour libérer deux migrants inconscients.
Presque simultanément, un voilier parti de Turquie transportant environ 60 migrants a fait naufrage au large de la Calabre, dans le sud de l’Italie. Les garde-côtes italiens ont pu secourir 12 personnes mais un passager est mort durant l’opération. Selon les médias, une cinquantaine de personnes sont portées disparues.
La Méditerranée, une route migratoire meurtrière
Selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), la Méditerranée centrale est l’une des routes migratoires les plus dangereuses au monde. En 2023, 3155 personnes y ont trouvé la mort ou ont disparu, contre 2411 l’année précédente. Cette zone concentre à elle seule 80% des morts en Méditerranée.
Les conditions météo jouent un rôle crucial. Mais les gens continuent à passer parce qu’ils changent de route et s’adaptent aux obstacles.
– Daniel Auerbacher, chef des opérations de SOS Méditerranée
Le dilemme des ONG de sauvetage en mer
Sur fond de crise migratoire, le gouvernement italien a durci sa politique à l’égard des ONG. Un décret les oblige à rejoindre « sans délai » un port italien après chaque sauvetage, les empêchant d’en effectuer plusieurs à la suite. En cas de désobéissance, elles risquent de lourdes amendes et la saisie de leur navire.
Mais pour les ONG, ce décret entre en contradiction avec le droit maritime qui impose de porter secours à tout bateau en détresse. Elles se retrouvent face à un dilemme cornélien et dénoncent la politique de « l’Europe forteresse » qui met des vies en danger.
La politique migratoire italienne en question
Arrivée au pouvoir fin 2022, la Première ministre Giorgia Meloni a fait de la réduction des flux migratoires l’une de ses priorités. Si les chiffres des arrivées par la mer en Italie sont en baisse (-56% sur les 5 premiers mois de 2023), les routes se sont en partie déplacées vers l’Espagne et la Grèce.
Pour l’exécutif italien, la présence des ONG en mer encouragerait les migrants à tenter la traversée. Une analyse que réfutent les organisations humanitaires, rappelant qu’elles représentent moins de 10% des personnes secourues en Méditerranée. Le débat est loin d’être clos.
Un drame humain qui interpelle l’Europe
Au-delà des chiffres, ce double naufrage est un terrible drame humanitaire qui endeuille une nouvelle fois la Méditerranée. Il met en lumière la détresse de milliers de migrants prêts à tout risquer pour un avenir meilleur, fuyant la guerre, la pauvreté ou les persécutions.
Face à cette tragédie, c’est toute la politique migratoire européenne qui est questionnée. Alors que les États membres peinent à s’accorder sur une répartition solidaire de l’accueil, les ONG en appellent à ouvrir des voies légales et sûres d’immigration. Un défi majeur pour une Europe traversée par les crises et la montée des populismes.