Le dossier nucléaire iranien revient sur le devant de la scène internationale alors que le Conseil des gouverneurs de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) se penche sur une nouvelle résolution critique à l’égard de Téhéran. Malgré quelques avancées récentes, les puissances occidentales restent frustrées par le manque de coopération de l’Iran et cherchent à maintenir la pression.
Un nouvel avertissement en perspective
Après un premier rappel à l’ordre en juin, les pays occidentaux, menés par l’Allemagne, la France, la Grande-Bretagne et les États-Unis, ont soumis un nouveau texte soulignant l’absence de progrès significatifs ces derniers mois. La résolution, qui devrait être adoptée jeudi soir, rappelle à l’Iran ses obligations légales en vertu du Traité de non-prolifération (TNP) ratifié en 1970.
Des explications “essentielles et urgentes” exigées
Au cœur des préoccupations figurent les traces d’uranium inexpliquées découvertes sur deux sites non déclarés près de Téhéran, Turquzabad et Varamin. Les auteurs de la résolution jugent “essentiel et urgent” que l’Iran fournisse des “réponses techniques crédibles” à ce sujet et réclament à l’AIEA “un rapport complet” d’ici le printemps 2025.
Une coopération en berne
Depuis 2021, l’Iran a considérablement restreint sa coopération avec l’Agence, allant jusqu’à débrancher des caméras de surveillance et retirer l’accréditation d’inspecteurs expérimentés. En parallèle, son programme nucléaire ne cesse de monter en puissance, attisant les inquiétudes de la communauté internationale, bien que Téhéran nie chercher à se doter de l’arme atomique.
Des “divergences” à Vienne
Cependant, cette nouvelle résolution intervient dans un contexte particulier, marqué par un certain décalage entre la position occidentale et celle du directeur général de l’AIEA, Rafael Grossi. Lors d’une récente visite à Téhéran, ce dernier a obtenu de l’Iran qu’il accepte d’entamer des préparatifs pour stopper l’expansion de son stock d’uranium hautement enrichi, une avancée qu’il a qualifiée de “pas concret dans la bonne direction”.
L’ombre de l’accord de 2015
En toile de fond plane l’accord sur le nucléaire iranien conclu à Vienne en 2015 (JCPOA), qui prévoyait un allègement des sanctions internationales contre Téhéran en échange de garanties sur le caractère pacifique de son programme nucléaire. Mais ce pacte a déraillé après le retrait unilatéral des États-Unis en 2018 sous la présidence de Donald Trump, qui a rétabli des mesures punitives. En représailles, l’Iran s’est progressivement affranchi de ses engagements, augmentant considérablement ses réserves de matières enrichies et portant le seuil d’enrichissement à 60 %, se rapprochant des 90 % nécessaires pour une bombe.
Une réaction iranienne attendue
Téhéran a d’ores et déjà prévenu qu’il réagirait “en conséquence et de manière appropriée” si la résolution était adoptée, comme il l’a fait par le passé. Selon le chef de la diplomatie iranienne, Abbas Araghchi, un tel vote “affaiblira” les relations entre l’Iran et l’AIEA. Certains experts craignent que cela ne nuise aux efforts diplomatiques de Rafael Grossi, même si les Occidentaux, frustrés, semblent déterminés à durcir le ton.
Entre fermeté et dialogue
Si l’Iran pourrait être tenté de franchir de nouveaux paliers dans son programme nucléaire, comme augmenter encore le niveau d’enrichissement, des analystes estiment qu’il cherchera à éviter une escalade trop brutale. Téhéran semble en effet vouloir garder une porte ouverte au dialogue, notamment dans la perspective d’un possible retour de Donald Trump à la Maison Blanche en 2024. Un moyen de préserver une marge de manœuvre face à celui qui avait claqué la porte de l’accord en 2018 mais qui “aime se positionner en négociateur en chef”, relève un expert.
Alors que le Conseil des gouverneurs de l’AIEA s’apprête à adresser un nouveau signal fort à l’Iran, les équilibres restent fragiles. Entre fermeté et volonté de dialogue, la communauté internationale cherche la voie étroite qui permettrait de préserver les acquis et d’éviter une dangereuse escalade sur ce dossier ultrasensible.