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Le Crabe Bleu Envahit la Corse : Un Fléau Pour les Pêcheurs

En Corse, le crabe aux pinces bleues prolifère de façon alarmante, menaçant la pêche locale. Les pêcheurs sont désespérés face à ce fléau, mais une lueur d'espoir émerge : et si ce crustacé envahissant devenait une curiosité gastronomique ?

C’est un petit crustacé bleu qui fait trembler les pêcheurs corses. Arrivé des côtes atlantiques, le crabe aux pinces bleues a envahi les lagunes de l’île de Beauté, mettant en péril la pêche artisanale locale. Face à cette menace, certains voient en ce crabe invasif un nouveau défi culinaire à relever.

Le cauchemar bleu des pêcheurs corses

Depuis quelques années, le crabe aux pinces bleues prolifère à une vitesse alarmante dans les eaux corses. Ce petit crustacé, originaire de l’Atlantique Nord, est capable de parcourir jusqu’à 10 km par jour en marchant et en nageant. Une mobilité impressionnante qui lui a permis de coloniser la plupart des lagunes de l’île, au grand dam des pêcheurs locaux.

Jean-Louis, un des derniers pêcheurs de lagunes de Corse, témoigne de la situation désastreuse : “Là où on pêchait autrefois du poisson, il n’y a plus rien. Les rares prises sont souvent abîmées, attaquées par les crabes. Ce n’est plus vendable.” Sous l’eau, les filets de Jean-Louis grouillent de centaines de crabes bleus, rendant la pêche quasiment impossible.

On peut considérer que c’est la fin du métier. On était une vingtaine de pêcheurs lagunaires il y a deux ans. On n’est plus que six et cinq l’année prochaine.

Jean-Louis, pêcheur corse

Une prolifération favorisée par le réchauffement climatique

Le crabe bleu profite du réchauffement des eaux pour se multiplier. Normalement, sa croissance devrait s’arrêter lorsque la température descend en dessous de 10°C. Mais comme l’explique Marie Garrido, écologue spécialiste des lagunes à l’Office de l’environnement de Corse, ce n’est plus le cas :

Ça fait deux hivers d’affilée qu’on a péniblement cette température de l’eau, donc les crabes continuent à croître, à proliférer, à migrer.

Marie Garrido, écologue

En l’espace de quelques années, la population de crabes bleus a triplé. Au sud de Bastia, la pêche à l’anguille est même quasiment à l’arrêt. Faute de pouvoir éradiquer l’espèce invasive, les scientifiques tentent de limiter son impact en préconisant des pêches intensives à des périodes et secteurs clés pour casser le cycle de reproduction.

Le crabe bleu, nouvelle star des assiettes ?

Face à ce fléau, certains restaurateurs corses ont décidé de s’adapter en mettant le crabe bleu à leur menu. Stéphane, chef cuisinier, a été agréablement surpris par la qualité de sa chair :

Il y a beaucoup de chair à l’intérieur. Elle est très bonne, très tendre.

Stéphane, chef cuisinier

Il accommode désormais le crabe aux pinces bleues avec sa bisque, pour le plus grand plaisir des touristes curieux de goûter cette nouvelle spécialité locale. Comme le souligne avec humour un vacancier, “ils ont fait disparaître toutes les autres espèces autour des étangs, donc ils méritent de finir dans nos assiettes !”

Pour Paul Luciani, gérant d’un restaurant à Furiani, la mobilisation des professionnels est indispensable pour réguler ce crustacé envahissant :

La seule solution actuellement, c’est que les restaurateurs prennent conscience qu’il faut aller sur ce produit pour aider nos pêcheurs locaux.

Paul Luciani, restaurateur

À l’image de la charcuterie corse, le crabe bleu pourrait bien devenir un incontournable des cartes des restaurants de l’île. Une manière originale de valoriser ce fléau tout en soutenant la pêche artisanale locale, durement touchée par cette invasion aux pinces bleues.

Mais la route est encore longue avant que le crabe bleu ne s’impose dans les assiettes des gourmets. Son marché reste confidentiel en Corse et les captures, bien que nombreuses, peinent à être écoulées. Il faudra sans doute du temps pour que les mentalités évoluent et que ce crustacé invasif soit pleinement considéré comme une ressource culinaire à part entière.

En attendant, les pêcheurs corses continuent tant bien que mal à exercer leur métier, en espérant que les efforts conjoints des scientifiques, des restaurateurs et des consommateurs permettront de freiner la prolifération du crabe aux pinces bleues. Un défi écologique et économique de taille pour préserver les fragiles écosystèmes lagunaires de l’île de Beauté.

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