Alors que l’Azerbaïdjan accueille actuellement la conférence annuelle de l’ONU sur le climat, la COP29, le pays fait l’objet d’un appel pressant de la part du Conseil de l’Europe concernant la situation des droits humains sur son territoire. Dans une lettre adressée au président azerbaïdjanais et rendue publique lundi, le Commissaire aux droits de l’Homme Michael O’Flaherty exhorte les autorités à libérer immédiatement tous les défenseurs des droits, journalistes et militants de la société civile emprisonnés pour avoir mené leur travail légitime ou exprimé des opinions dissidentes.
Un appel à l’abandon des poursuites et au respect des droits
Au-delà de la libération des personnes injustement détenues, le Commissaire demande l’abandon des poursuites pénales engagées contre elles, ainsi que la levée des restrictions associées, comme l’interdiction de voyager à l’étranger. Il insiste également sur la nécessité de mener des enquêtes effectives concernant les allégations de mauvais traitements infligés à plusieurs défenseurs des droits, journalistes et militants lors de leur garde à vue.
Michael O’Flaherty rappelle aux autorités azerbaïdjanaises leur devoir de garantir les droits d’accès à un avocat et à des soins médicaux pour les personnes privées de liberté. Il les presse aussi de s’assurer que toutes les lois et pratiques relatives aux libertés d’association, de réunion pacifique et d’expression soient conformes aux normes du Conseil de l’Europe en matière de droits humains.
Des parlementaires exclus pour non-respect d’engagements
Ces derniers mois, les relations entre l’Azerbaïdjan et le Conseil de l’Europe se sont tendues. En janvier, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) avait déjà exclu temporairement les 12 membres de la délégation azerbaïdjanaise pour non-respect d’« engagements majeurs » pris par Bakou. Un signal fort envoyé au pays concernant la dégradation de l’état des droits et des libertés sur son sol.
La COP29, une occasion de faire pression
Alors que Bakou est sous les projecteurs en raison de la COP29, des organisations internationales de défense des droits tirent la sonnette d’alarme. Elles appellent l’ONU et le Conseil de l’Europe à saisir cette occasion pour accentuer la pression sur le régime azerbaïdjanais et « mettre fin à la persécution des voix critiques » dans le pays. Un message porté haut et fort par la société civile mondiale.
Une situation jugée « très préoccupante »
Le cri d’alarme ne vient pas seulement du Commissaire aux droits de l’Homme. Dans un avis rendu public le même jour, le Comité consultatif de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales du Conseil de l’Europe juge la situation globale en Azerbaïdjan « très préoccupante » en matière de droits humains, de démocratie et d’État de droit. Il souligne l’impact négatif des restrictions aux libertés fondamentales sur les droits des personnes appartenant à des minorités.
Le Haut-Karabakh, une situation humanitaire critique
Le comité d’experts attire aussi l’attention sur la situation dans le Haut-Karabakh, région séparatiste peuplée majoritairement d’Arméniens et reconquise par l’armée azerbaïdjanaise en septembre 2023. Le conflit a provoqué l’exode de plus de 100 000 personnes vers l’Arménie dans des conditions dramatiques. Le Conseil de l’Europe exhorte Bakou à réunir les conditions politiques, juridiques et pratiques permettant un retour sûr et durable des déplacés arméniens, dans le respect de leurs droits fondamentaux.
Autre point d’inquiétude soulevé : les discours de haine et l’intolérance visant la communauté arménienne, qui doivent être fermement combattus par les autorités pour faciliter la réconciliation. Un défi immense au vu des plaies encore béantes laissées par ce conflit sanglant aux racines anciennes.
L’Azerbaïdjan face à ses responsabilités internationales
En accueillant un événement mondial comme la COP29, l’Azerbaïdjan a une opportunité unique de redorer son blason sur la scène internationale et de montrer sa volonté d’honorer ses engagements en matière de droits humains. Les appels répétés du Conseil de l’Europe constituent autant de rappels à l’ordre pour Bakou, sommé de se conformer aux standards européens et internationaux.
Au-delà des déclarations, c’est un véritable changement de cap qui est attendu, avec des actes concrets pour libérer les prisonniers d’opinion, garantir les libertés fondamentales et œuvrer à la réconciliation avec la communauté arménienne. L’Azerbaïdjan joue sa crédibilité et sa réputation sur la manière dont il saura répondre à ces défis, sous le regard attentif de la communauté internationale.
Une chose est sûre : le pays ne pourra pas faire l’économie d’une remise en question profonde de ses pratiques s’il veut regagner la confiance de ses partenaires européens et s’affirmer comme un acteur responsable sur la scène mondiale. La balle est dans le camp de Bakou, qui devra prouver par des réformes ambitieuses et un dialogue apaisé sa volonté de tourner la page des dérives autoritaires.