Malgré sa réputation de champion de la bonne gouvernance, la Suisse n’est pas à l’abri de la corruption. C’est le constat sans appel dressé par le Conseil de l’Europe dans un rapport publié ce lundi. L’organisation pointe du doigt des failles préoccupantes dans le dispositif helvétique de prévention de la corruption, en particulier au sein du gouvernement et de la police.
Une stratégie anti-corruption jugée trop timide
Si la Suisse figure en haut des classements mondiaux de perception de la corruption, le Groupe d’États contre la Corruption (Greco) estime que la stratégie du Conseil fédéral en la matière « pourrait être plus ambitieuse et plus concrète« . Le rapport exhorte les autorités à prendre des « mesures spécifiques » pour prévenir la corruption chez les hauts fonctionnaires de l’exécutif, à commencer par les conseillers fédéraux eux-mêmes.
Vers plus de transparence sur les conflits d’intérêts
Parmi les recommandations phares du Greco, on note l’appel à une plus grande transparence concernant les intérêts commerciaux et financiers des ministres et hauts responsables. L’objectif : mettre en lumière d’éventuels conflits d’intérêts et mieux encadrer les pratiques de lobbying et de pantouflage. Le rapport préconise aussi de rendre publiques les récusations des participants aux séances du gouvernement.
Le groupe de travail qui assure le suivi de la stratégie anti-corruption manque d’indépendance et de ressources pour ce faire.
Rapport du Greco
La protection des lanceurs d’alerte en question
Autre point d’inquiétude soulevé par le Conseil de l’Europe : la réticence observée au sein de la Police judiciaire fédérale et de l’Office fédéral de la douane à utiliser le système de protection des lanceurs d’alerte. Si ce dispositif fonctionne de manière « adéquate » pour les dénonciations émanant de fonctionnaires, il semble peiner à s’imposer dans ces deux administrations pourtant exposées aux risques de corruption.
Vers un renforcement des contrôles
Face à ces constats alarmants, le Greco appelle de ses vœux un renforcement des contrôles et de la prévention. Il suggère notamment :
- D’accroître les moyens alloués à la lutte anti-corruption
- De mener des campagnes de sensibilisation au sein des administrations à risque
- De promouvoir activement la transparence à tous les échelons du pouvoir
- De garantir une réelle indépendance aux organes de contrôle
Autant de pistes qui, si elles étaient suivies d’effets, permettraient à la Suisse de consolider son statut de modèle en matière de bonne gouvernance. Mais le chemin semble encore long. Il revient désormais au gouvernement et au parlement de se saisir de ces recommandations pour transformer l’essai. L’enjeu : préserver la confiance des citoyens en leurs institutions, un bien plus que jamais précieux en ces temps troublés.
Notre rôle est d’aider les États à identifier leurs failles en matière de lutte contre la corruption et à y remédier de manière efficace.
Un responsable du Greco
Reste à savoir si ce signal d’alarme sera entendu en haut lieu. Les prochains mois seront décisifs pour juger de la détermination de la Suisse à combattre ce fléau qui, s’il n’est pas endémique sur son territoire, n’en demeure pas moins une menace bien réelle. Un défi majeur pour une démocratie qui se veut exemplaire.