Haïti est au bord du gouffre. Gangrenée par la violence des gangs, la capitale Port-au-Prince est livrée au chaos. Face à cette situation désespérée, l’ONU a approuvé en octobre dernier l’envoi d’une force multinationale pour épauler la police haïtienne totalement dépassée. Mais à ce jour, cette mission peine à se concrétiser faute de financement adéquat. Une réalité que le secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, juge “absolument inacceptable”.
Haïti au bord de l’effondrement
La situation en Haïti n’a cessé de se détériorer ces derniers mois. Les gangs armés ont pris le contrôle de larges pans de la capitale, semant la terreur parmi la population. Viols, enlèvements, exécutions sommaires… Leur violence ne connaît aucune limite. Les forces de police, en sous-effectif et sous-équipées, sont totalement impuissantes face à cette vague de criminalité sans précédent.
Cette insécurité généralisée a des conséquences humanitaires dramatiques. Des milliers de familles ont dû fuir leurs foyers pour échapper aux exactions des bandes armées. Beaucoup se retrouvent dans des camps de fortune insalubres, sans accès à l’eau potable ni aux soins. La faim et les maladies font des ravages, en particulier chez les enfants. Haïti est au bord de l’effondrement total.
L’ONU vote l’envoi d’une force multinationale
Face à cette crise majeure, le Conseil de sécurité de l’ONU a voté en octobre l’envoi d’une mission multinationale dirigée par le Kenya. Baptisée “Multinational Security Support Mission”, celle-ci doit compter environ 2500 membres, policiers et militaires. Sa mission : assister la police haïtienne dans sa lutte contre les gangs, sécuriser les infrastructures vitales et faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire.
La communauté internationale ne peut pas abandonner le peuple haïtien à son sort. C’est notre responsabilité d’agir.
– Antonio Guterres, secrétaire général de l’ONU
Mais voilà, depuis ce vote, la concrétisation de cette force se fait attendre. La raison principale : le manque de financement. À ce jour, trop peu de pays ont répondu à l’appel de l’ONU pour contribuer financièrement au déploiement et à l’équipement de la mission. Une situation que déplore Antonio Guterres.
Antonio Guterres dénonce une situation “inacceptable”
Interrogé lundi par l’AFP, le secrétaire général des Nations Unies n’a pas mâché ses mots. Pour lui, le fait que la mission pour Haïti soit insuffisamment financée est “absolument inacceptable”. “Quand il y a une guerre, on trouve de l’argent pour toutes sortes de choses, quand il y a une crise financière et que des banques doivent être sauvées, on trouve de l’argent. Quand un peuple souffre dans une situation aussi désespérée, et qu’on a besoin que d’une somme relativement faible d’argent, je pense que c’est totalement inacceptable que cet argent ne soit pas disponible”, a-t-il fustigé.
Antonio Guterres appelle les États membres de l’ONU à prendre leurs responsabilités. Il estime que la communauté internationale a le devoir d’agir pour venir en aide à Haïti et éviter un effondrement total du pays, qui aurait des conséquences désastreuses pour toute la région. Sans un soutien rapide et conséquent, la mission de sécurité risque de ne jamais voir le jour, laissant le champ libre aux bandes armées.
Haïti mérite-t-elle d’être abandonnée ?
La colère d’Antonio Guterres est compréhensible. Comment justifier qu’on laisse le peuple haïtien livré à lui-même dans une telle détresse ? Que dirait-on si un pays européen sombrait dans une telle spirale de violence ? Les grandes puissances se mobiliseraient immédiatement. Alors pourquoi cette indifférence face au drame haïtien ?
Certes, Haïti est un pays pauvre, qui peine à se relever des multiples catastrophes qui l’ont frappé : séisme, choléra, instabilité politique chronique… Mais cela ne justifie en rien qu’on regarde ailleurs quand sa population sombre dans l’enfer des gangs. C’est une question d’humanité et de solidarité.
La communauté internationale, et en premier lieu les pays riches, doit prendre ses responsabilités. Financer la mission de l’ONU est le minimum que l’on puisse faire. Mais au-delà, c’est un véritable plan Marshall dont Haïti a besoin pour se reconstruire durablement et offrir un avenir à sa jeunesse. Cela demande un engagement sur le long-terme. Mais n’est-ce pas le devoir des nations qui en ont les moyens d’aider celles qui sont en détresse ? Tourner le dos à Haïti aujourd’hui, c’est condamner tout un peuple au désespoir. Et semer les graines de nouvelles crises. Nous avons tous intérêt à ce qu’Haïti se relève. Il est encore temps d’agir.