Alors que l’urgence climatique n’a jamais été aussi prégnante, un combustible fossile continue de jouer les premiers rôles dans le mix énergétique mondial : le charbon. Ce minerai, utilisé depuis la révolution industrielle, est le plus émetteur de gaz à effet de serre parmi toutes les sources d’énergie. Pourtant, malgré les engagements des États à réduire leurs émissions, le charbon est loin d’avoir tiré sa révérence. Décryptage d’un paradoxe énergétique aux lourdes conséquences environnementales.
Le charbon, énergie reine de l’ère industrielle
Depuis le XIXe siècle, le charbon a été le moteur de l’industrialisation à travers le monde. Facile et peu coûteux à extraire, avec un fort pouvoir calorifique, il s’est imposé comme le combustible de prédilection pour produire de l’électricité et alimenter les usines. Aujourd’hui encore, il reste la première source d’électricité au niveau mondial, avec 36% de la production totale.
Cette position dominante du charbon s’explique par plusieurs facteurs :
- Des réserves abondantes et bien réparties géographiquement
- Un coût d’extraction et d’utilisation relativement faible
- Une technologie maîtrisée et des infrastructures existantes
- Une forte demande des pays émergents pour soutenir leur croissance
Résultat, la consommation mondiale de charbon n’a cessé d’augmenter ces dernières décennies, portée notamment par des géants comme la Chine ou l’Inde. Et malgré un léger recul ces dernières années, son déclin est beaucoup plus lent qu’espéré.
Un impact climatique désastreux
Le problème, c’est que la combustion du charbon libère d’énormes quantités de dioxyde de carbone (CO2), le principal gaz à effet de serre responsable du réchauffement climatique. Par kilowattheure produit, les centrales à charbon émettent près de deux fois plus de CO2 que les centrales à gaz, et jusqu’à 100 fois plus que les énergies renouvelables comme l’éolien ou le solaire.
Le charbon est de loin le combustible fossile le plus dommageable en termes d’émissions de gaz à effet de serre.
– Agence Internationale de l’Énergie
Ainsi, bien qu’il ne représente qu’un quart de la consommation mondiale d’énergie primaire, le charbon est responsable de 40% des émissions de CO2 liées à cette consommation. Un chiffre colossal, qui fait du charbon l’ennemi numéro un des défenseurs du climat.
Des engagements climatiques insuffisants
Conscients de la nécessité de réduire drastiquement les émissions pour limiter le réchauffement, la plupart des pays se sont engagés, via l’Accord de Paris en 2015, à atteindre la neutralité carbone d’ici le milieu du siècle. Un objectif qui implique de se passer des combustibles fossiles, et en premier lieu du charbon.
Certains pays montrent l’exemple, à l’image du Royaume-Uni qui vient de fermer sa dernière centrale à charbon. Mais au niveau mondial, la dynamique est loin d’être suffisante :
- De nombreux pays, notamment émergents, continuent de miser massivement sur le charbon
- Des centrales neuves continuent d’être construites, engageant leur utilisation pour des décennies
- Les investissements et subventions en faveur du charbon restent élevés
Résultat, les experts estiment que la consommation de charbon ne baissera que de 8% d’ici 2030 par rapport à 2019, là où il faudrait une division par deux pour tenir les objectifs de l’Accord de Paris.
Quelle transition pour sortir du charbon ?
Heureusement, des alternatives au charbon existent et montent en puissance, au premier rang desquelles les énergies renouvelables (éolien, solaire, hydroélectricité, biomasse…). Plus propres et maintenant souvent moins chères que le charbon, elles permettent de produire une électricité décarbonée.
Mais pour assurer la transition énergétique, encore faut-il :
- Accélérer massivement les investissements dans les renouvelables
- Développer les réseaux et le stockage pour gérer leur intermittence
- Mettre en place des mesures d’efficacité et de sobriété énergétique
- Accompagner les travailleurs et régions dépendants du charbon
C’est tout l’enjeu des politiques énergétiques et climatiques des prochaines années. Car sans une sortie rapide et ordonnée du charbon, c’est notre capacité à préserver un climat vivable qui est en jeu. L’avenir dira si le bon sens et la coopération internationale sauront s’imposer face au roi charbon…