De sombres révélations secouent les relations entre le Canada et l’Inde. Une agence d’espionnage canadienne affirme que New Delhi se sert de la cybertechnologie pour surveiller des militants sikhs vivant à l’étranger, notamment au Canada qui abrite la plus grande communauté sikhe hors d’Inde. Ces allégations font suite à l’assassinat en 2023 d’un citoyen canadien d’origine sikhe qui militait pour la création d’un État indépendant appelé le Khalistan.
Selon le Centre de la sécurité des télécommunications (CST) du Canada, l’Inde multiplie les cyberattaques contre les réseaux du gouvernement canadien en plus de “suivre et surveiller les activistes et les dissidents” sikhs outre-mer. Caroline Xavier, cheffe du CST, considère désormais l’Inde comme une “cybermenace émergente”. Les récentes tensions diplomatiques “dicteront fort probablement” l’ampleur de la menace à venir, souligne le rapport de l’agence.
Un haut responsable indien mis en cause
L’affaire prend une tournure encore plus explosive avec les révélations d’un haut responsable canadien devant un comité parlementaire. Selon ses propos, Amit Shah, ministre indien de l’Intérieur et plus proche allié du Premier ministre Narendra Modi, aurait autorisé une campagne de collecte de renseignements et d’attaques visant des militants sikhs au Canada, allant jusqu’à l’assassinat de l’un d’entre eux en 2023. L’implication directe d’une des plus hautes sphères du gouvernement indien constitue un développement majeur.
Le Premier ministre canadien dénonce une ingérence inacceptable
Justin Trudeau a affirmé disposer “d’indices clairs” sur le rôle de l’Inde dans une vaste campagne d’intimidation, de violence et de meurtre visant des sikhs canadiens. Le Premier ministre dénonce une ingérence étrangère intolérable sur le sol canadien. New Delhi rejette ces accusations, les qualifiant “d’absurdes”. Mais la police fédérale a déjà procédé à quatre arrestations en lien avec l’assassinat du militant.
Vives tensions diplomatiques entre Ottawa et New Delhi
En représailles, le Canada et l’Inde ont chacun expulsé l’ambassadeur de l’autre pays ainsi que cinq diplomates de haut rang. Les relations bilatérales traversent une crise sans précédent. New Delhi nie farouchement toute implication mais Ottawa maintient ses accusations, s’appuyant sur un faisceau d’indices jugés crédibles.
Il est clair que nous considérons l’Inde comme une (cyber)menace émergente.
Caroline Xavier, cheffe du Centre de la sécurité des télécommunications du Canada
La communauté sikhe canadienne sous pression
Ce scandale d’espionnage et d’ingérence sème l’émoi au sein de la diaspora sikhe canadienne, la plus nombreuse au monde. Estimée à plus d’un demi-million de personnes, elle compte de nombreux militants réclamant la création d’un État indépendant dans le nord de l’Inde. Ces aspirations séparatistes sont une épine dans le pied de New Delhi qui semble déterminé à surveiller, intimider voire éliminer ceux qu’elle considère comme une menace, où qu’ils se trouvent.
Pour la communauté, c’est un choc de réaliser l’ampleur de la surveillance dont elle fait l’objet, y compris sur le sol canadien. Nombreux sont ceux qui craignent désormais pour leur sécurité et celle de leurs proches restés en Inde. Beaucoup en appellent au gouvernement canadien pour assurer leur protection face à ce qu’ils dénoncent comme une persécution extraterritoriale.
Une affaire qui en dit long sur les dérives du cyberespionnage
Au-delà des sikhs canadiens, ce scandale met en lumière les dérives du cyberespionnage à l’ère numérique. Les États semblent de plus en plus tentés d’utiliser la technologie pour surveiller et réprimer les voix dissidentes, sans considération des frontières. Une tendance inquiétante qui soulève de sérieuses questions sur le respect de la souveraineté des États et des libertés individuelles.
Le Canada, qui s’est toujours posé en chantre des droits humains, entend bien faire la lumière sur cette affaire. Mais il devra naviguer avec prudence pour ne pas envenimer davantage ses relations déjà tendues avec l’Inde. Un véritable casse-tête diplomatique en perspective.