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Le calvaire des familles de Daech dans le camp d’al-Hol

Dans le camp d'al-Hol, géré par les Kurdes en Syrie, 40 000 personnes dont de nombreuses femmes et enfants de Daech vivent sous la menace constante d'une résurgence de l'État islamique. Un reportage exclusif au cœur d'une poudrière...

Au cœur du nord-est de la Syrie, le camp d’al-Hol est devenu un véritable casse-tête pour les autorités kurdes. Érigé à l’origine pour accueillir les déplacés de la guerre civile, ce camp ressemble désormais à une immense prison à ciel ouvert. Plus de 40 000 personnes y survivent dans des conditions précaires, dont une majorité de femmes et d’enfants liés de près ou de loin à l’État islamique.

Derrière les murs de ce gigantesque camp, une menace sourde couve : celle du retour en force de Daech. Malgré la défaite territoriale du « califat » autoproclamé en 2019, son idéologie mortifère n’a pas disparu des esprits.

Une poudrière à retardement

« Ici, vous ne pouvez faire confiance à personne », glisse notre traductrice en pénétrant dans le camp. Dans les allées boueuses d’al-Hol, des silhouettes fantomatiques drapées de niqabs noirs déambulent, entourées d’une nuée d’enfants. « Ces gens ont soutenu jusqu’au bout le califat », assure Jihan Hannan, une responsable kurde. L’ambiance est lugubre, étouffante.

Malgré une sécurité renforcée, les incidents se multiplient. Selon des sources internes, des radicalisées imposent leur loi dans certaines sections du camp, harcelant celles jugées trop « modérées ». Des téléphones portables circulent sous le manteau, peut-être pour maintenir des liens avec Daech.

L’arme des enfants

Plus de la moitié des résidents d’al-Hol ont moins de 12 ans. Un terreau fertile pour l’endoctrinement. « Ces enfants sont nés sous Daech. C’est la seule réalité qu’ils connaissent », s’alarme un travailleur humanitaire. Livrés à eux-mêmes, beaucoup errent sans éducation ni perspectives.

Si on les abandonne, ils deviendront la prochaine génération de djihadistes.

Un responsable kurde

L’épineuse question du rapatriement

Le sort de ces femmes et enfants est un véritable casse-tête diplomatique. Leurs pays d’origine rechignent souvent à les rapatrier, les considérant comme une menace sécuritaire. Pourtant, leur maintien dans des camps comme al-Hol comporte aussi des risques, préviennent les experts.

  • Selon l’ONU, plus de 7000 enfants de 60 nationalités différentes seraient détenus dans des camps du nord-est syrien
  • Seule une poignée de pays, principalement européens et asiatiques, ont accepté des rapatriements au compte-goutte

Un avenir en pointillé

Entre peur d’une résurgence de Daech et rejet de l’opinion publique, le dilemme semble insoluble. Pourtant, la prise en charge de ces familles brisées sera cruciale pour briser le cercle de la radicalisation. En attendant, à al-Hol, on vit au jour le jour, avec la sourde appréhension du pire.

C’est un moment crucial où tout est possible. Si on gère mal la situation, les conséquences pourraient être dévastatrices.

Un analyste spécialiste du djihadisme

Dans ce grand échiquier géopolitique qu’est devenue la Syrie, le camp d’al-Hol cristallise les défis de l’après-Daech. Sécuritaire, humanitaire, politique : l’équation est complexe. Mais ignorer le problème ne fera que le rendre plus explosif encore. L’avenir de toute une région se joue peut-être derrière les grilles de ce camp oublié.

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