C’est un pas de plus vers la réparation des torts du passé colonial. Lundi, lors d’une cérémonie solennelle au palais royal de Bénin City au Nigeria, des représentants du Stanley Museum of Art de l’université de l’Iowa aux États-Unis ont remis à l’Oba du Bénin, Ewuare II, deux précieux artefacts volés par les troupes britanniques lors du sac du royaume du Bénin en 1897. Il s’agit d’une plaque en laiton finement ouvragée représentant un haut dignitaire de la cour, et d’une sculpture en bois d’une poule, probablement un retable dédié à des ancêtres maternels.
Des trésors d’une grande importance spirituelle et artistique
L’Oba Ewuare II, descendant direct du souverain qui régnait sur le puissant royaume du Bénin à la fin du XIXe siècle, a salué ce geste du musée américain. Il a souligné l’importance spirituelle et artistique de ces œuvres pour son peuple, espérant que “les autres musées d’Amérique suivront cet exemple”. Car les deux artefacts restitués ne sont qu’une infime partie des milliers de pièces d’art pillées lors de l’attaque coloniale britannique et dispersées depuis dans les collections occidentales.
Les célèbres “bronzes du Bénin”
Parmi ces trésors figurent les fameux “bronzes du Bénin”, un ensemble de plaques et de sculptures en laiton réalisées entre le XVIe et le XVIIIe siècle, témoignant du raffinement et de la maîtrise technique des artisans du royaume. Plusieurs milliers de ces pièces ornaient les murs du palais royal avant d’être emportées comme butin de guerre par les Britanniques. Elles sont aujourd’hui exposées dans de grands musées européens et américains, malgré les demandes répétées de restitution du Nigeria.
La violence et la perte associées à ces objets ne pourront jamais être oubliées.
Cory Gundlach, conservateur en art africain du Stanley Museum
En rendant ces deux œuvres, le Stanley Museum reconnaît ce douloureux passé. Son conservateur en art africain, Cory Gundlach, a déclaré que le musée se consacre “à la reconnaissance de ce chapitre tragique de l’histoire et à son utilisation comme catalyseur pour un changement positif”. Un premier pas encourageant, alors que les appels à la restitution du patrimoine africain pillé se font de plus en plus pressants sur le continent.
Vers une vague de restitutions ?
De nombreux pays africains, comme le Bénin, le Sénégal ou la Côte d’Ivoire, réclament depuis des années le retour des œuvres d’art dérobées pendant la période coloniale et conservées dans les musées occidentaux. Si quelques restitutions symboliques ont eu lieu ces dernières années, beaucoup de collections résistent encore, à l’image du British Museum qui détient des centaines de bronzes du Bénin.
Le prince Aghatise Erediauwa, de la cour royale du Bénin, espère que le geste du Stanley Museum “ouvre la voie à beaucoup d’autres restitutions de musées américains”. Un souhait partagé par tous ceux qui œuvrent à la réparation des spoliations coloniales et à la reconnaissance de la richesse des patrimoines africains. La restitution de ces trésors est une étape essentielle pour tourner la page de ce sombre chapitre de l’Histoire.