Lazard, l’une des plus anciennes institutions financières de Wall Street, vient d’annoncer son entrée remarquée dans l’univers de la tokenisation d’actifs. La firme, qui gère plus de 245 milliards de dollars d’actifs, s’est associée à Bitfinex Securities pour créer des fonds tokenisés, une première pour cette vénérable maison fondée il y a 175 ans.
Cette initiative marque un nouveau rapprochement entre la finance traditionnelle et le monde des cryptomonnaies. La tokenisation, qui consiste à représenter des actifs réels sur une blockchain sous forme de jetons numériques, est en plein essor. D’après les cabinets McKinsey et BCG, ce marché pourrait peser plusieurs milliers de milliards de dollars dans les années à venir.
Un partenariat prometteur entre tradition et innovation
L’alliance entre Lazard et Bitfinex Securities a été scellée par un protocole d’accord signé à Lugano en Suisse. Les fonds tokenisés seront émis conformément à la réglementation du Kazakhstan, où Bitfinex et son partenaire SkyBridge sont autorisés à opérer sous la supervision de l’AFSA.
Bitfinex sera en charge du processus de tokenisation, tandis que SkyBridge agira en tant qu’intermédiaire et gestionnaire des fonds. Ces produits seront accessibles aux investisseurs particuliers, avec certaines restrictions géographiques, et pourront être achetés en stablecoins USDT.
Une diversification vers le grand public
Jusqu’à présent, les fonds gérés par Lazard, axés sur les actions mondiales et les marchés émergents, étaient réservés à une clientèle institutionnelle et aux investisseurs accrédités. Cette initiative permet à la firme de s’ouvrir aux particuliers via une structure de “fonds de fonds” tokenisés.
Nous sommes une entreprise d’investissement B2B, et c’est une bonne façon de servir les investisseurs particuliers.
Matthias Kruse, directeur général de Lazard
D’après M. Kruse, la tokenisation améliore l’efficacité, accroît la liquidité et contribue à réduire les coûts opérationnels par rapport aux méthodes traditionnelles. Cette démarche s’inscrit dans une tendance de fond où de grands noms de la finance comme BlackRock ou HSBC se lancent dans les actifs tokenisés.
Vers une démocratisation de la gestion d’actifs ?
L’arrivée d’un mastodonte comme Lazard dans ce secteur confirme l’attrait croissant de la tokenisation pour les acteurs établis. En rendant accessibles au grand public des véhicules d’investissement jusque-là réservés aux grands portefeuilles, cette initiative pourrait contribuer à démocratiser la gestion d’actifs.
Toutefois, certains observateurs s’interrogent sur les réelles motivations de ces géants de la finance. S’agit-il d’un véritable engagement en faveur de l’innovation et de l’inclusion financière, ou d’une tentative opportuniste de capter de nouveaux flux en surfant sur la vague crypto ?
Un rapprochement qui soulève des questions
Le partenariat entre une institution traditionnelle comme Lazard et une plateforme crypto comme Bitfinex peut surprendre. Bien que Bitfinex Securities soit une entité régulée, distincte de la plateforme d’échange, cette dernière a connu par le passé des controverses notamment autour du stablecoin Tether.
Le choix du Kazakhstan comme juridiction pour l’émission des fonds interpelle également. Si le pays a adopté une réglementation favorable aux cryptoactifs pour attirer les investissements, son cadre réglementaire est encore jeune et peu éprouvé par rapport aux places financières établies.
Enfin, la tokenisation de produits financiers complexes à destination du grand public n’est pas sans risques. Elle soulève des questions de protection des investisseurs, de transparence et d’éducation financière. Les régulateurs devront se montrer vigilants pour encadrer ces innovations et prévenir d’éventuelles dérives.
Conclusion
L’entrée de Lazard dans l’arène de la tokenisation illustre la fascination croissante de la finance traditionnelle pour les cryptoactifs. Ce rapprochement ouvre des perspectives stimulantes en termes de démocratisation et d’efficacité de la gestion d’actifs.
Néanmoins, il soulève aussi des interrogations quant aux motivations réelles des acteurs, aux risques pour les investisseurs et à la solidité du cadre réglementaire. L’avenir dira si cette convergence entre deux mondes jusqu’ici opposés tiendra ses promesses et profitera réellement au plus grand nombre.