Selon Garry Kasparov, célèbre opposant au Kremlin et ancien champion du monde d’échecs, l’issue de la guerre en Ukraine sera déterminante pour l’avenir politique de la Russie. Lors d’une conférence de presse à l’occasion du Sommet annuel de Genève pour les droits de l’homme et la démocratie, il a affirmé sans détour : « Il n’y aura pas de liberté en Russie, pas de fin du régime de Poutine, sans la victoire de l’Ukraine ».
Une défaite de Poutine synonyme de changement en Russie
Pour Garry Kasparov, qui vit en exil à New York depuis une décennie après avoir été catalogué comme « extrémiste » par le régime russe, même une victoire partielle de l’Ukraine pourrait ébranler le pouvoir de Vladimir Poutine. À l’inverse, si le président russe parvient à présenter l’issue du conflit comme un succès, par exemple en conservant des territoires conquis ou en obtenant une levée des sanctions, il renforcera son emprise sur le pays.
Un « dictateur » qui ne peut être menacé qu’en cas de revers
L’opposant de longue date, qui a délaissé les échiquiers en 2005 pour se consacrer au militantisme politique, résume ainsi la situation : « Un dictateur n’est jamais en danger s’il est toujours en pleine ascension ». Seule une défaite militaire significative serait donc en mesure de fragiliser le régime de Vladimir Poutine, au pouvoir depuis plus de deux décennies.
L’Ukraine peut continuer le combat si l’Europe la finance
Malgré les rodomontades du Kremlin, Garry Kasparov estime que l’économie russe devrait s’effondrer d’ici 12 à 18 mois à cause de la guerre. Pendant ce temps, l’Ukraine pourrait poursuivre sa résistance si les Européens lui fournissent les moyens financiers nécessaires pour acquérir des armes américaines, juge-t-il.
Poutine n’a qu’un seul but : rester au pouvoir
Depuis l’annexion de la Crimée en 2014, les Occidentaux peinent à définir une stratégie commune face à la Russie, déplore l’ancien champion d’échecs. Car « Poutine a une idée très simple : rester au pouvoir. C’est tout. Il n’y a pas d’autre idée », martèle-t-il. Et dans ce contexte, « la guerre est l’outil le plus efficace » pour asseoir sa légitimité, faute d’autre projet à offrir aux Russes.
L’empire russe doit disparaître et l’avenir de la Russie ne se situe peut-être pas dans les frontières actuelles de la Russie. La façon dont je vois l’avenir : la Russie doit restituer tous les territoires occupés – Crimée y compris.
Garry Kasparov
Les « rêves impériaux » de la majorité des Russes
Toutefois, Garry Kasparov regrette que « la majorité des Russes vivent encore dans des rêves impériaux ». Selon lui, la survie du régime de Poutine repose sur ces ambitions expansionnistes, qui « ne disparaîtront jamais, parce que rien d’autre ne peut justifier qu’il reste au pouvoir à vie ». Une analyse qui laisse peu d’espoir d’évolution démocratique à court terme en Russie.
« L’empire russe doit disparaître »
Pour Garry Kasparov, la dislocation de « l’empire russe », y compris la restitution de la Crimée annexée, apparaît comme une condition sine qua non pour envisager un avenir différent pour le pays. Une perspective radicale, mais qui témoigne de l’ampleur des défis qui attendent la Russie au lendemain de cette guerre dévastatrice.