Face aux tensions croissantes entre les États-Unis et la Chine dans le Pacifique, l’Australie renforce ses capacités de production d’armement sur son territoire. Le pays vient en effet de nouer des partenariats majeurs avec les groupes industriels de défense Lockheed Martin et Thales pour fabriquer localement des missiles guidés de longue portée ainsi que des obus d’artillerie.
Des partenariats pour sécuriser l’approvisionnement en munitions
Dans un contexte international instable marqué par une compétition stratégique exacerbée entre Washington et Pékin, l’Australie cherche à sécuriser ses approvisionnements en armement. C’est dans cette optique que Canberra a annoncé mercredi la signature de deux accords industriels d’envergure :
- Un partenariat avec l’américain Lockheed Martin pour produire sur le sol australien des systèmes de lance-roquettes multiples avec guidage (GMLRS). Le complexe industriel prévu, d’un coût de 200 millions de dollars, aura une capacité de production annuelle allant jusqu’à 4000 missiles, soit plus d’un quart de la production mondiale actuelle de GMLRS.
- Une collaboration avec le français Thales pour assembler en Australie des obus d’artillerie de 155mm M795, renforçant encore les capacités militaires du pays.
Selon le ministre australien de l’Industrie de la défense Pat Conroy, ces investissements répondent directement aux défis sécuritaires posés par la montée des tensions sino-américaines dans la région Asie-Pacifique :
La compétition stratégique entre les États-Unis et la Chine est une caractéristique fondamentale de l’environnement de sécurité de l’Australie (…) Cette compétition est à son plus haut niveau dans notre région.
Dans un monde marqué par la crise et le désordre, une armée bien équipée est un élément important de la défense nationale.
Une stratégie de défense axée sur le Pacifique
Cette annonce s’inscrit dans le cadre de la nouvelle stratégie de défense dévoilée en avril par le gouvernement australien. Celle-ci prévoit une forte augmentation des dépenses militaires et met l’accent sur le théâtre Pacifique, face notamment aux “tactiques coercitives” attribuées à la Chine dans la zone.
Un changement de posture illustré fin septembre par un essai chinois de missile balistique intercontinental équipé d’une ogive factice dans l’océan Pacifique, une première en plusieurs décennies. Ce tir de démonstration a suscité l’inquiétude et les protestations de plusieurs pays de la région, Australie en tête.
Renforcer l’autonomie et les alliances
Avec ces partenariats industriels, l’Australie cherche donc à renforcer non seulement ses propres capacités mais aussi à rassurer ses alliés. En effet, plusieurs pays proches des États-Unis disent aujourd’hui craindre des pénuries de munitions, alors que d’importantes quantités d’armes sont livrées à l’Ukraine et à Israël.
Ces accords s’ajoutent aux autres piliers de la posture de défense australienne pour les décennies à venir :
- Le développement accéléré de la flotte de surface nationale.
- Le futur déploiement de sous-marins à propulsion nucléaire dans le cadre de l’alliance AUKUS avec les États-Unis et le Royaume-Uni.
En tissant ces partenariats industriels et militaires, en Australie comme à l’étranger, Canberra espère ainsi pouvoir faire face efficacement aux défis stratégiques qui se profilent dans la région indo-pacifique. Car si les canons se taisent encore, la course aux armements, elle, s’accélère dangereusement dans cette zone hautement stratégique du globe. L’attention portée au Pacifique et la volonté australienne de muscler son appareil de défense ne sont sans doute pas près de faiblir dans les années à venir.