Dans un coin paisible d’Israël, entre les collines verdoyantes et les routes reliant Jérusalem à Tel-Aviv, un monastère se dresse comme un havre de paix. Mais en avril dernier, des flammes ont menacé cet équilibre fragile, dévorant une partie des vignes et des oliviers qui font vivre la communauté. Aujourd’hui, les moines de Latroun, accompagnés de bénévoles, se retroussent les manches pour replanter, un geste chargé de sens. Ce n’est pas seulement une question de survie économique, mais un symbole d’espoir face à l’adversité. Comment une poignée de plants peut-elle porter autant de promesses ?
Un Monastère Ancré dans la Tradition
Le monastère de Latroun, niché dans un paysage vallonné, est bien plus qu’un lieu de culte. Fondé il y a 135 ans par des moines français, il incarne une tradition où la prière et le travail manuel s’entrelacent. Les vignes, soigneusement entretenues depuis des générations, ne sont pas seulement une source de revenus grâce à la production de vin. Elles représentent un lien profond avec la terre et une expression de la spiritualité des moines trappistes, une branche catholique dédiée à la contemplation et à la simplicité.
Chaque année, les moines produisent du vin et de l’huile d’olive, des produits qui incarnent leur engagement envers une vie sobre et harmonieuse. Mais cette harmonie a été brisée par un incendie dévastateur, qui a réduit en cendres un tiers des vignobles et endommagé des milliers d’oliviers. Face à ce désastre, la communauté n’a pas baissé les bras. Elle a choisi de replanter, de reconstruire, et de transformer la perte en un message d’espoir.
L’Incendie : Une Épreuve pour Latroun
En avril, des incendies de forêt, attisés par une canicule et des vents violents, ont ravagé les environs du monastère. Les flammes, qui se sont propagées à une vitesse fulgurante, ont atteint les abords de Latroun, forçant l’évacuation des vingt moines qui y résident. Pour une communauté habituée à la quiétude et à l’isolement, quitter le monastère fut un choc.
Cela a été très difficile parce que nous n’avons pas l’habitude de quitter notre monastère et certains frères sont très âgés.
Frère Athanase
Les moines ont craint le pire : la destruction totale de leur lieu de vie. Heureusement, l’édifice principal a été épargné, mais les terres agricoles ont payé un lourd tribut. Environ cinq hectares de vignes, soit un tiers du vignoble, ont été réduits en cendres. Parmi les 5 000 oliviers du domaine, un millier a été entièrement détruit, et 70 % des arbres restants ont été gravement endommagés. La production d’huile d’olive, qui s’élevait à trois tonnes l’année précédente, sera inexistante cette année.
| Dommages | Impact |
|---|---|
| Vignoble | 1/3 détruit (5 hectares) |
| Oliviers | 1 000 brûlés, 70 % endommagés |
| Production huile d’olive | 0 tonne cette année |
Ce bilan est un coup dur pour une communauté qui dépend de ses récoltes pour vivre. Pourtant, loin de se décourager, les moines ont vu dans cette épreuve une occasion de se tourner vers l’avenir.
Replanter : Un Acte de Résilience
Quelques semaines après l’incendie, les moines ont lancé un appel à l’aide. Des bénévoles, venus de Tel-Aviv et d’ailleurs, ont répondu présents pour participer à la replantation des vignes. Sous un soleil brûlant, ils ont travaillé côte à côte avec les moines, creusant la terre et alignant soigneusement les jeunes plants. Ce travail, bien que physique, est empreint d’une signification profonde.
Planter de nouvelles vignes est un symbole d’espoir. Parce que si nous pensions que demain, la terre serait bombardée et réduite à néant, nous n’entreprendrions rien.
Père Christian-Marie
Pour le père Christian-Marie, qui vit à Latroun depuis près de trois décennies, chaque plant enfoncé dans le sol est un pari sur l’avenir. C’est un refus de céder au désespoir, même dans une région marquée par les tensions et les incertitudes. Ce geste, simple en apparence, résonne comme une prière pour la paix, un thème cher à la communauté.
Les bénévoles, eux, trouvent dans cette expérience une connexion rare avec la nature. Noga Eshed, une retraitée de 74 ans venue de Tel-Aviv, décrit l’émotion de toucher la terre, un acte devenu rare dans nos sociétés modernes.
Je vois des gens toucher la terre, le sol. Et ce n’est pas très courant. Nous sommes très déconnectés de cela de nos jours.
Noga Eshed
Pour Noga, participer à cette replantation est aussi une façon de tisser des liens avec les moines, qu’elle considère comme des amis. Cette solidarité, entre des personnes d’horizons différents, donne une dimension humaine et universelle à l’effort collectif.
Les Trappistes : Une Vie de Simplicité
Les moines de Latroun appartiennent à l’ordre des trappistes, connu pour son mode de vie austère et contemplatif. Leur quotidien est rythmé par la prière, le travail manuel et le silence, des valeurs qui les ancrent dans une quête spirituelle. La culture des vignes et des oliviers s’inscrit dans cette philosophie : travailler la terre, c’est honorer la création et vivre en harmonie avec elle.
Mais cette simplicité ne les rend pas imperméables aux défis du monde extérieur. Les incendies, exacerbés par le changement climatique, rappellent la vulnérabilité de leur mode de vie. Pourtant, leur foi et leur résilience leur permettent de surmonter ces épreuves. Comme le souligne le père Aloïs, les moines se sentent désormais mieux préparés à affronter d’éventuelles catastrophes futures.
En fin de compte, nous sommes entre les mains de Dieu.
Père Aloïs
Cette phrase, empreinte de sérénité, reflète l’état d’esprit des moines. Ils acceptent les aléas de la vie tout en travaillant à reconstruire ce qui a été perdu. Leur confiance en l’avenir est une leçon pour tous.
Un Avenir à Reconstruire
La replantation des vignes n’est que le début d’un long processus. Les nouveaux plants mettront des années à produire des raisins de qualité, et les oliviers endommagés nécessiteront environ quatre ans pour retrouver leur rendement habituel. Cette attente, loin d’être un fardeau, est vue comme une opportunité de patience et de persévérance.
Les moines envisagent également des mesures pour mieux protéger leurs terres à l’avenir. Des systèmes d’irrigation améliorés et des coupe-feu pourraient être mis en place pour limiter les risques. Mais au-delà des solutions techniques, c’est leur état d’esprit qui fait la différence : un mélange de pragmatisme et de foi.
- Replantation des vignes pour assurer la pérennité du vignoble.
- Réhabilitation des oliviers endommagés sur plusieurs années.
- Renforcement des mesures de protection contre les incendies.
- Mobilisation de bénévoles pour renforcer les liens communautaires.
Ce projet dépasse la simple reconstruction. Il s’agit de transmettre un message d’espoir, de montrer que même après la destruction, la vie peut repartir. Les moines, par leur travail et leur foi, incarnent cette idée avec une force tranquille.
Un Symbole pour le Monde
L’histoire du monastère de Latroun résonne bien au-delà de ses collines. Dans un monde marqué par les conflits, les catastrophes naturelles et les incertitudes, l’acte de replanter des vignes devient une métaphore puissante. C’est un rappel que la résilience et l’espoir peuvent naître des cendres, à condition de s’unir et de croire en un avenir meilleur.
Les bénévoles, en travaillant aux côtés des moines, participent à cette vision. Ils ne se contentent pas de planter des vignes ; ils sèment des graines d’espoir et de solidarité. Ce geste, ancré dans la terre, porte un message universel : face à l’adversité, il est toujours possible de reconstruire.
Pour les moines, chaque plant est une prière, chaque rangée un pas vers la paix. Leur travail, humble et patient, nous invite à réfléchir à notre propre rapport à la nature, à la communauté et à l’avenir. Et si, comme eux, nous choisissions de planter des graines d’espoir, même dans les moments les plus sombres ?
