L’assurance-vie, ce placement plébiscité par des millions de Français pour sa fiscalité avantageuse et sa réputation de valeur refuge, cache une réalité bien moins reluisante. C’est ce que révèle un rapport explosif publié par l’ONG Reclaim Finance, qui accuse ce produit d’épargne favori des ménages hexagonaux de contribuer activement au dérèglement climatique.
L’assurance-vie, un poids lourd de la finance au service des énergies fossiles
Avec plus de 1900 milliards d’euros d’encours, l’assurance-vie pèse lourd dans le paysage financier français. Mais derrière ces chiffres vertigineux se cache un secret bien gardé : une partie de cette manne financerait à grande échelle l’industrie des énergies fossiles, principale responsable du réchauffement planétaire. Du pétrole au charbon en passant par le gaz, aucun secteur ne serait épargné.
Sur plus de 8000 unités de compte analysées, 63% contiennent au moins une entreprise qui développe des projets d’énergies fossiles.
Extrait du rapport de Reclaim Finance
Comment expliquer un tel paradoxe pour un placement vanté pour sa sécurité ? La réponse se niche dans le fonctionnement même de l’assurance-vie. En effet, l’argent confié par les épargnants est réinvesti par les assureurs dans une multitude d’entreprises et de projets, avec pour seul boussole la rentabilité financière. Les considérations environnementales passent trop souvent au second plan, quand elles ne sont pas purement et simplement ignorées.
Des engagements climatiques insuffisants
Certes, la plupart des grands assureurs affichent désormais haut et fort leur volonté de contribuer à la lutte contre le réchauffement climatique. Mais entre les paroles et les actes, le fossé reste béant. Selon Reclaim Finance, leurs politiques de désinvestissement des énergies fossiles demeurent parcellaires et souffrent de nombreuses exceptions, surtout concernant les fonds en unités de compte.
- Seuls 2 assureurs sur 27 ont pris des engagements à la hauteur de l’urgence climatique
- Plus des 2/3 peuvent encore investir dans de nouveaux projets pétroliers et gaziers
Une frilosité qui tranche avec l’attente croissante des citoyens pour une finance plus verte et responsable. Selon un récent sondage, près de 6 épargnants sur 10 accordent une place importante à l’impact environnemental de leurs placements. Un signal fort envoyé aux assureurs, qui ne peuvent plus se contenter de démarches superficielles et de promesses creuses.
Passer des paroles aux actes
Face à ce constat alarmant, l’heure n’est plus aux constats mais à l’action. Pour Reclaim Finance, les assureurs doivent urgemment revoir en profondeur leurs politiques d’investissement et les aligner sur une trajectoire compatible avec l’accord de Paris. Cela passe notamment par l’exclusion de toute entreprise développant de nouveaux projets fossiles, sans exception et sur l’intégralité de leurs portefeuilles.
Les pouvoirs publics et les autorités de régulation ont eux aussi un rôle crucial à jouer. Ils doivent muscler les contraintes et les contrôles, pour s’assurer que les produits financiers vendus aux épargnants ne contribuent pas en catimini à alimenter la crise climatique. Un renforcement des labels ISR et Greenfin pourrait par exemple permettre d’éviter que des fonds polluants se parent abusivement d’atours écologiques.
L’assurance-vie a certainement encore de beaux jours devant elle. Mais pour rester l’épargne chérie des Français, elle doit impérativement opérer sa mue verte et prouver qu’elle peut être un moteur de la transition énergétique, plutôt qu’un de ses fossoyeurs. L’avenir de notre climat en dépend.