Alors que la bande de Gaza subit une grave crise humanitaire depuis le déclenchement du conflit avec Israël en octobre 2023, l’armée israélienne a organisé jeudi une visite pour la presse au point de passage de Kerem Shalom. L’objectif : montrer l’arrivée de cargaisons d’aide destinées au territoire palestinien assiégé, alors qu’Israël est accusé d’en empêcher l’acheminement.
Selon des sources proches des organisations humanitaires internationales, les civils gazaouis manquent cruellement de nourriture et les livraisons d’aide n’ont jamais été aussi faibles depuis le début de la guerre. Une situation catastrophique imputée par beaucoup au blocus total imposé par Israël, qui de son côté reproche aux ONG leur incapacité à distribuer de grandes quantités d’aide.
Des centaines de cargaisons bloquées à la frontière
Lors de cette visite à Kerem Shalom, principal point d’entrée de l’aide humanitaire, les journalistes ont pu constater la présence de nombreux camions chargés de marchandises provenant principalement d’Egypte, de Jordanie, de Cisjordanie et d’Israël, mais aussi de l’Unicef, de Rahma Worldwide ou encore du World Food Kitchen. Des cargaisons qui attendent d’être distribuées par des organisations internationales employant des chauffeurs locaux.
Aujourd’hui, nous avons plus de 800 cargaisons qui attendent que la communauté internationale les prenne et les livre aux habitants de Gaza.
Colonel Abdallah Halabi, responsable de la division Gaza au sein du Cogat
Pourtant, l’armée israélienne rejette les accusations d’obstruction, assurant qu’il n’existe aucune restriction sur les camions ou les quantités d’aide autorisés à entrer à Gaza. Selon le colonel Halabi, les marchandises peuvent parfois attendre « des mois » côté palestinien avant d’être récupérées et acheminées.
L’Unrwa dénonce des entraves israéliennes
Une version contredite par les organisations internationales, au premier rang desquelles l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa). Celle-ci affirme qu’Israël empêche l’entrée des camions dans la bande de Gaza, notamment dans le nord du territoire ravagé par les combats. Seuls 65 camions par jour auraient pu passer en octobre, contre 500 en moyenne avant la guerre.
Les conditions de survie s’amenuisent pour les 65 000 à 75 000 personnes qui se trouveraient encore dans le nord de Gaza.
L’Unrwa
Outre les restrictions israéliennes, les livraisons d’aide sont compliquées par les pillages de bandes armées ou de civils désespérés, ainsi que par les opérations militaires qui bloquent régulièrement les routes. Israël assure chercher des solutions, ouvrant de nouveaux points de passage et itinéraires, mais la situation humanitaire continue de se détériorer dramatiquement chaque jour.
Un dossier hautement politique
Au-delà de l’urgence sur le terrain, la question de l’aide humanitaire à Gaza est devenue un sujet politique majeur. Le Hamas, qui contrôle l’enclave, accuse régulièrement Israël d’utiliser le blocus pour faire plier la population. De son côté, l’État hébreu affirme que l’aide est détournée par le mouvement islamiste pour servir à des fins militaires.
Une guerre de communication qui se joue aussi auprès de la communauté internationale. En montrant les cargaisons bloquées aux frontières, Israël cherche à se dédouaner de sa responsabilité dans la crise humanitaire. Mais pour beaucoup d’observateurs, le compte n’y est pas. Ils pointent du doigt la disproportion des moyens, et appellent à la levée immédiate du blocus pour permettre l’entrée de l’aide à Gaza, où la situation est désormais catastrophique.