Alors que les théories du complot sur les élections de 2020 continuent de semer le doute chez de nombreux Américains, un comté d’Arizona a décidé de jouer la carte de la transparence totale. Bienvenue dans “l’aquarium”, le nouveau centre électoral du comté de Pinal, où les murs entièrement vitrés permettent à chacun de suivre le cheminement des bulletins de vote.
Un bâtiment high-tech pour regagner la confiance
Situé à Florence, ce centre dernier cri offre une vue imprenable sur toutes les étapes du processus électoral : tri des bulletins, vérification des signatures, comptage par machines… Rien n’échappe à l’œil vigilant des observateurs, qu’ils soient sur place ou devant leur écran, grâce aux dizaines de caméras qui retransmettent en direct sur internet.
Mike Goodman, élu républicain à la tête du comté, ne cache pas ses motivations : « En 2020, il m’a semblé évident que nous perdions largement la confiance de nos habitants. Certains ne votent même plus, persuadés que c’est truqué. » Dans cet Etat-clé où Biden n’a devancé Trump que de 10 500 voix, les rumeurs de fraude ont trouvé un terreau fertile, attisées par le refus du milliardaire de concéder sa défaite.
Sécurité maximale et câbles apparents
Pour couper court à toute suspicion, rien n’a été laissé au hasard dans ce temple de l’« extrême transparence ». Derrière les parois de verre, les urnes sont scellées par des cadenas GPS. Les machines à compter, elles, sont reliées à un serveur isolé d’internet par des câbles colorés bien visibles, prouvant l’inviolabilité du système. Un investissement de 32 millions de dollars pour le comté, qui espère faire des émules dans tout le pays.
Une tendance nationale face à la défiance
Car la méfiance ronge la démocratie américaine. Selon un sondage du Pew Research Center, seuls 47% des électeurs républicains pensent que la présidentielle de 2024 entre Harris et Trump sera équitable. Pour endiguer le phénomène, les initiatives se multiplient : formation des citoyens au Colorado, visites des centres de dépouillement en Arizona…
Ces mesures ont un impact considérable sur les sceptiques et ceux qui ne comprennent pas le processus électoral.
Thom Reilly, politologue à l’université d’Etat de l’Arizona
Mais la route est encore longue, comme l’illustre le cas de Kevin Cavanaugh. Cet élu du comté de Pinal, battu aux primaires républicaines pour le poste de shérif, conteste toujours le résultat et agite des graphiques “prouvant” une manipulation, malgré un audit indépendant qui a conclu à l’absence de fraude. « Lorsqu’on a des élus qui ne sont pas dignes de confiance, la confiance du public dans son ensemble est détruite », déplore son collègue Mike Goodman.
Vers des élections en “aquarium” ?
Malgré ces résistances, l’Arizona mise sur la pédagogie et la transparence pour restaurer la foi dans les urnes. Et le pari semble payant, à en croire Tim Vendettuoli, 72 ans, qui observe le dépouillement depuis le centre vitré :
Si tous les comtés étaient gérés comme ça, je pense qu’on aurait de très bonnes élections. Les gens se sentiraient en confiance, parce que c’est très transparent.
Tim Vendettuoli, retraité républicain
Reste à savoir si cette « révolution de verre » suffira à recoller les morceaux d’une démocratie fragilisée. Une chose est sûre : dans les allées feutrées de “l’aquarium” de Pinal, on scrute désormais les bulletins comme des poissons rouges. Un symbole qui en dit long sur l’état de la confiance électorale aux Etats-Unis.