Nichée au pied des Pyrénées, l’Ariège fait figure d’exception dans le paysage politique français. Alors que le Rassemblement national (RN) progresse partout, ce territoire rural reste un bastion de la gauche. Une résistance qui intrigue et fascine à l’heure où les campagnes semblent céder aux sirènes de l’extrême droite. Immersion dans ce département pas comme les autres.
L’Ariège, terre de gauche historique
Depuis des décennies, l’Ariège est un fief incontesté de la gauche. Ici, François Mitterrand a réalisé certains de ses meilleurs scores, dépassant les 60%. Un ancrage qui perdure malgré les bouleversements de la société. Aux dernières législatives, la candidate socialiste Martine Froger l’a emporté dès le premier tour avec plus de 50% des voix. Une performance rare qui témoigne de la solidité de cet héritage.
Avant, le Front national faisait 5%…
– Un habitant de l’Ariège
Pourtant, même en Ariège, le RN grignote du terrain. Avec près de 40% au premier tour, le parti lepéniste réalise une percée spectaculaire. Un “séisme” pour ce territoire où l’extrême droite était marginale il y a peu. “Avant, le Front national faisait 5%”, se souvient un Ariégeois avec nostalgie et inquiétude.
Les clés de la résistance ariégeoise
Comment expliquer cette résistance de la gauche en terres ariégeoises ? Plusieurs facteurs permettent de comprendre cette singularité :
- Un fort tissu associatif et culturel qui maintient une sociabilité et une solidarité locale.
- La présence de figures de gauche charismatiques implantées de longue date.
- Une économie encore marquée par l’agriculture et la ruralité, moins sujette au vote RN que d’autres territoires désindustrialisés.
- Un certain isolement géographique qui préserve des influences extérieures.
Mais cette exception ariégeoise est fragile. La poussée du RN aux dernières élections en témoigne. Pour Pierre, restaurateur à Foix, “il faut continuer à faire vivre nos villages, nos associations. C’est ça qui nous protège”. Un défi de taille face aux vents contraires.
L’Ariège, un laboratoire politique ?
Au-delà de son cas particulier, l’Ariège pourrait bien être un laboratoire politique. Ce territoire démontre qu’une résistance de la gauche en milieu rural est possible. À condition d’entretenir un ancrage local fort et une vie sociale dynamique. Des leçons qui pourraient inspirer d’autres territoires tentés par le repli identitaire et le vote protestataire.
Mais attention à ne pas mythifier l’exception ariégeoise. Ici aussi, les difficultés s’accumulent : déclin des services publics, vieillissement de la population, précarité galopante… Autant de défis qui fragilisent ce bastion et pourraient faire basculer l’équilibre politique local.
On ne peut pas tenir éternellement sur nos acquis. Il faut se réinventer.
– Un élu ariégeois
Pour cet élu local, la gauche ariégeoise doit se remettre en question pour rester conquérante : “On ne peut pas tenir éternellement sur nos acquis. Il faut se réinventer, aller chercher de nouveaux publics”. Un constat lucide qui vaut pour l’Ariège… Comme pour l’ensemble des forces progressistes françaises. L’exception ariégeoise n’a pas fini de passionner et d’inspirer.