Le suspense perdure à Matignon. L’annonce du nouveau gouvernement de François Bayrou, initialement prévue avant Noël, a été repoussée à ce lundi 23 décembre, selon une source proche du Premier ministre. Cette décision intervient après un week-end décisif de tractations politiques pour tenter d’obtenir une majorité à l’Assemblée nationale.
Un gouvernement d’ouverture en quête de soutiens
Le leader centriste, nommé il y a deux semaines à Matignon, souhaite former un gouvernement de personnalités issues de la droite, du centre et de la gauche, afin d’éviter une nouvelle motion de censure. Jeudi dernier, il avait convié les chefs de partis à Matignon pour leur proposer d’intégrer son équipe, à l’exception de La France Insoumise et du Rassemblement National.
Mais les négociations s’avèrent ardues. Si plusieurs ténors de droite comme Xavier Bertrand (LR) ou Valérie Pécresse seraient prêts à franchir le pas, la gauche se montre plus circonspecte. Le premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure a jugé les propositions de François Bayrou «consternantes» et menace de voter une motion de censure.
Les personnalités pressenties pour entrer au gouvernement
Parmi les personnalités évoquées ces derniers jours pour entrer au gouvernement Bayrou, on retrouve :
- Les ex-ministres Élisabeth Borne (Travail) et Gérald Darmanin (Intérieur)
- Le président des Hauts-de-France Xavier Bertrand (LR)
- L’ancienne candidate LR à la présidentielle Valérie Pécresse
- L’ex-ministre socialiste François Rebsamen, proche de François Bayrou
Plusieurs ministres du gouvernement Barnier pourraient également conserver leur portefeuille, à l’instar de Catherine Vautrin (Cohésion des territoires), Rachida Dati (Culture) et Bruno Retailleau (Intérieur).
L’ultimatum de François Bayrou aux partis politiques
Vendredi, alors que les discussions avec les responsables politiques s’enlisaient, François Bayrou leur avait adressé un ultimatum : lui donner une réponse claire avant dimanche soir sur leur participation, faute de quoi il composerait son gouvernement sans eux. Mais à l’issue du week-end, l’entourage du Premier ministre évoquait encore des «réglages» en cours, laissant penser que les tractations se poursuivaient en coulisses.
«Cela avance […] La structuration des grands pôles ministériels est fixée», a cependant assuré dimanche le président des députés MoDem Marc Fesneau, proche de François Bayrou.
Un remaniement délicat après trois mois d’instabilité politique
Ce remaniement ministériel intervient après trois mois d’instabilité politique en France, marqués par la chute successive de deux gouvernements. En septembre, Jean Castex avait été renversé par une motion de censure transpartisane. Son successeur Michel Barnier n’aura tenu que trois mois avant de subir le même sort début décembre.
Dans ce contexte, l’enjeu pour François Bayrou est de parvenir à bâtir une majorité solide à l’Assemblée, en associant des personnalités de diverses sensibilités politiques. Mais les appels du pied du centriste en direction de la gauche se heurtent pour l’instant à de vives réticences. Le député LFI Alexis Corbière a ainsi dénoncé une «grande braderie des convictions».
Des chantiers économiques et sociaux urgents
Le futur gouvernement Bayrou devra s’atteler en priorité à la préparation du budget 2025, sous la pression des oppositions et des marchés financiers. D’autres dossiers brûlants comme la réforme des retraites, la transition écologique ou le pouvoir d’achat s’annoncent également épineux à négocier dans un parlement sans majorité claire.
Pour le patron du MoDem, qui a déjà essuyé plusieurs revers politiques ces dernières années, l’enjeu est de taille. En cas d’échec à obtenir une majorité, il pourrait à son tour être menacé par une motion de censure. Une perspective qui placerait Emmanuel Macron dans une position délicate, à mi-mandat.
Vers un report de l’annonce après la trêve des confiseurs ?
Si aucun accord n’est trouvé ce lundi, une autre option serait de reporter l’annonce du gouvernement au-delà de Noël. Mais ce scénario comporte aussi des risques, car il retarderait d’autant le traitement des dossiers urgents et donnerait une impression d’impuissance. François Bayrou espère donc encore annoncer son équipe au plus vite, pour tourner la page de cette séquence agitée.
Réponse attendue dans les prochaines heures, alors que la France retient son souffle avant cette annonce gouvernementale à haut risque. Un an et demi après sa réélection, Emmanuel Macron joue gros avec ce énième remaniement ministériel. L’avenir de son second mandat pourrait se jouer en partie avec le casting et la solidité du nouvel exécutif.