Un geste inconsidéré, une plaisanterie de très mauvais goût, et c’est toute une carrière diplomatique qui vole en éclats. Jon Benjamin, ambassadeur du Royaume-Uni au Mexique, vient d’en faire les frais, évincé de son poste après avoir brandi un fusil dans une voiture officielle, visant par jeu ses collaborateurs. Un scandale révélateur des tensions extrêmes qui minent le pays, gangrené par la violence des cartels.
Le Faux Pas Fatal d’un Diplomate
C’est une vidéo de quelques secondes à peine, mais qui aura suffit à mettre fin à près de 40 ans de carrière diplomatique. Sur ces images, on découvre Jon Benjamin, ambassadeur britannique en poste au Mexique depuis 2021, assis à l’avant d’un véhicule. Hilare, il se retourne, épaule un fusil et vise les sièges arrière où se trouvent certains de ses collaborateurs. Une scène surréaliste, captée lors d’une visite officielle en avril dans les états du Durango et du Sinaloa, ce dernier étant le fief de l’un des plus violents cartels du pays.
Nous sommes conscients de cet incident et nous avons pris les mesures appropriées.
– Communiqué du Ministère britannique des Affaires Étrangères
Des mesures qui auront donc été radicales, puisque Jon Benjamin a été promptement remercié et son nom a d’ores et déjà disparu de l’organigramme de l’ambassade. Un épilogue brutal pour ce diplomate chevronné, en poste depuis près de 40 ans et qui se décrivait encore récemment sur son profil LinkedIn comme “Ambassador, British Embassy Mexico City. August 2021 – May 2024”.
Un Pays Ravagé par les Violences
Mais au-delà de l’anecdote, aussi choquante soit-elle, cette affaire en dit long sur la situation sécuritaire catastrophique qui gangrène le Mexique. Car si le geste de Jon Benjamin apparaît aussi déplacé et inconséquent, c’est bien parce qu’il intervient dans un pays ravagé par la violence des gangs et des cartels de la drogue.
Quelques chiffres suffisent à donner la mesure du drame qui se joue au quotidien :
- 30 000 homicides enregistrés en moyenne chaque année
- Les 3/4 sont imputables aux cartels et au crime organisé
- Le Sinaloa, visité par l’ambassadeur, est l’un des états les plus meurtriers
Dans ce contexte, on comprend que la plaisanterie de Jon Benjamin ait été perçue comme particulièrement déplacée et offensante. D’autant que sa visite dans le Sinaloa, fief du célèbre cartel éponyme, avait justement pour but d’évoquer les questions sécuritaires et la coopération entre le Royaume-Uni et le Mexique en la matière.
Un Incident Révélateur de Tensions Multiples
Au final, cette affaire apparaît symptomatique des multiples tensions et contradictions qui traversent la diplomatie britannique et plus largement occidentale face à la situation mexicaine :
- Volonté de coopération sécuritaire et judiciaire face aux cartels
- Mais aussi tentation du déni ou du cynisme face à une ultraviolence devenue presque routinière
- Sans oublier la poursuite d’intérêts économiques dans un grand pays en développement
Autant de tiraillements que cristallise à sa manière la funeste plaisanterie de Jon Benjamin. Un ambassadeur ne devrait-il pas être le premier à mesurer la portée de ses gestes et paroles, surtout sur un sujet aussi sensible ? C’est peu dire que la légèreté de son attitude tranche avec la gravité de la situation.
Pour le Mexique en tout cas, cet incident diplomatico-sécuritaire vient rappeler une fois de plus, si besoin en était, l’urgence de trouver des réponses à la spirale de violence qui ravage le pays. Les autorités, souvent débordées et parfois complices, semblent bien démunies face aux brutales et sanglantes exactions des cartels de la drogue. Pire, en banalisant voire en tournant en ridicule une situation dramatique, le geste de Jon Benjamin montre combien la communauté internationale peine encore à prendre la mesure du drame mexicain.