Dans un rebondissement diplomatique inattendu, la République tchèque vient de rouvrir son ambassade à Damas, pourtant fermée depuis le renversement du président syrien Bachar al-Assad en décembre dernier. Cette réouverture surprise s’inscrit dans le cadre d’un accord faisant de Prague la puissance protectrice des intérêts américains en Syrie.
Une réouverture discrète pendant les fêtes
C’est durant la période de Noël que l’ambassade tchèque a rétabli ses activités, comme l’a révélé le ministre des Affaires étrangères Jan Lipavsky à la télévision publique tchèque jeudi soir. Une manière de passer inaperçue pour cette réouverture délicate, quelques semaines seulement après le coup d’État ayant renversé Bachar al-Assad, poussant Prague à fermer et évacuer son ambassade en urgence.
Le retour du diplomate en charge des affaires américaines
Signe que cette réouverture est avant tout motivée par l’accord faisant de la Tchéquie la puissance protectrice des intérêts américains, c’est le retour du chef de la section chargée des affaires américaines qui a été mis en avant par le ministre Lipavsky. Un diplomate expérimenté, Vitezslav Pivonka, a d’ailleurs été nommé à la tête de l’ambassade en tant que chargé d’affaires.
Un diplomate rompu aux relations tendues avec la Russie
Le choix de Vitezslav Pivonka n’est pas anodin. Cet ambassadeur a passé six ans à Moscou jusqu’en mai 2024, traversant notamment la crise diplomatique de 2021 marquée par l’expulsion massive de diplomates russes et tchèques suite aux accusations de Prague envers la Russie pour l’explosion d’un dépôt de munitions en 2014. Une expérience des relations tendues qui sera précieuse à Damas.
Le soutien américain derrière la réouverture
Si Prague a franchi le pas de rouvrir son ambassade si rapidement, c’est suite à l’appel du secrétaire d’État américain Antony Blinken en personne, qui tenait à s’assurer de la poursuite de l’accord de représentation des intérêts américains par la Tchéquie. Un soutien de poids dans ce dossier sensible.
Une diplomatie qui « marche sur des oeufs »
Le ministre Lipavsky a reconnu que la Tchéquie, qui soutient fermement Israël au Moyen-Orient et l’Ukraine face à la Russie, « marche sur des oeufs » concernant la Syrie. En effet, les responsables du nouveau gouvernement syrien sont visés par différentes sanctions internationales en raison de leur passé, compliquant l’établissement de relations diplomatiques.
Une main tendue vers le nouveau pouvoir syrien
Malgré ces obstacles, Jan Lipavsky estime qu’il faut « répondre à l’appel » du nouveau pouvoir en place à Damas qui dit vouloir rétablir les liens avec le monde. Un geste d’ouverture dicté par un objectif stratégique : faire sortir les troupes russes, déployées aux côtés de Bachar al-Assad pendant la guerre civile, du territoire syrien.
Vers une normalisation des relations avec la Syrie ?
Cette réouverture de l’ambassade tchèque, certes motivée par les intérêts américains, n’en reste pas moins un premier pas vers une potentielle normalisation des relations avec la Syrie post-Assad. Un signal diplomatique fort, à contre-courant des sanctions encore en vigueur, qui sera scruté de près par la communauté internationale.
Au final, ce geste audacieux de Prague s’apparente à un numéro d’équilibriste diplomatique. Représenter les intérêts de Washington tout en tendant la main à un régime syrien toujours controversé, le tout sous le regard intéressé de Moscou qui conserve des troupes dans le pays. Un défi de taille pour la diplomatie tchèque, dont la réussite pourrait influencer le cours des événements dans une Syrie en pleine recomposition post-Assad.