À la veille d’une visite diplomatique de haut niveau en Chine, l’Allemagne entend faire preuve de fermeté sur les sujets de discorde avec Pékin. Annalena Baerbock, ministre allemande des Affaires étrangères, a affirmé dans un communiqué son intention d’aborder ouvertement les différends entre Berlin et Pékin, notamment sur des dossiers sensibles comme l’industrie automobile et la guerre en Ukraine.
Privilégiant le dialogue à la confrontation, la cheffe de la diplomatie allemande n’en souligne pas moins l’importance de défendre les intérêts européens face aux pratiques jugées déloyales de la Chine. Au cœur des préoccupations : les subventions massives de l’État chinois à son industrie automobile, source de tensions avec l’Union européenne qui y voit une concurrence déséquilibrée.
L’Europe riposte aux subventions chinoises dans l’automobile
Face à ce qu’elle considère comme une « surproduction subventionnée par l’État », l’UE a récemment imposé des surtaxes douanières sur les voitures électriques importées de Chine. Une décision qualifiée de « protectionniste » par Pékin, qui a saisi l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Pour Annalena Baerbock, il s’agit avant tout de « ne pas tolérer que d’autres violent les règles du jeu internationales au détriment de l’industrie allemande et européenne ».
Au-delà de la question des subventions, la ministre pointe du doigt le non-respect par la Chine des normes de l’Organisation internationale du travail (OIT), « ignorées au nom d’un avantage concurrentiel ». Une allusion à peine voilée aux accusations de violations des droits humains dont Pékin fait l’objet, notamment dans la région du Xinjiang. Un dossier sur lequel le constructeur allemand Volkswagen a récemment pris ses distances, annonçant la cessation de ses activités dans cette zone sensible.
La guerre en Ukraine, autre pomme de discorde
Outre les questions économiques, Annalena Baerbock entend aborder avec son homologue chinois Wang Yi le dossier épineux de la guerre en Ukraine. Regrettant le soutien apporté par la Chine à la Russie, « à l’encontre des intérêts européens », la ministre juge ce sujet incontournable. Un avis que ne semble pas partager Pékin, qui privilégie une position ambiguë dans ce conflit.
« Au lieu d’être, en tant que membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU, un garant de la paix et de la sécurité dans le monde, la Chine va à l’encontre de nos intérêts européens avec son aide économique et militaire à la Russie »
– Annalena Baerbock, ministre allemande des Affaires étrangères
Malgré ces divergences profondes, l’Allemagne mise sur le dialogue avec la Chine, comme en témoigne la référence d’Annalena Baerbock à la récente COP29 de Bakou. Lors de ce sommet sur le climat, « l’Europe et la Chine ont travaillé ensemble pour une nouvelle approche du financement climatique », rappelle-t-elle, y voyant la preuve que la coopération reste possible entre les deux puissances.
Une relation à l’équilibre délicat
Pour autant, pas question pour Berlin de passer sous silence les nombreux points de friction avec Pékin. Au-delà des enjeux économiques et géopolitiques, c’est toute la question des valeurs qui oppose les deux pays. Des divergences que la ministre allemande entend bien mettre sur la table lors de sa visite, quitte à crisper ses interlocuteurs chinois.
« La coopération vaut mieux que la confrontation – sans être naïf »
– Annalena Baerbock, ministre allemande des Affaires étrangères
Un exercice d’équilibriste pour la diplomatie allemande, qui cherche à défendre ses intérêts et ses principes face à un partenaire aussi essentiel que clivant. Car si les différends sont nombreux, l’interdépendance économique entre les deux pays reste une réalité incontournable. Un constat qui pousse Berlin à privilégier le dialogue, même avec ceux qui « voient les choses différemment », selon la formule d’Annalena Baerbock.
Reste à savoir si cette stratégie de fermeté dans la coopération portera ses fruits face à une Chine peu encline aux concessions. Une chose est sûre : la visite de la ministre allemande à Pékin s’annonce d’ores et déjà comme un test grandeur nature pour les relations sino-européennes. Un rendez-vous crucial, à l’heure où les tensions géopolitiques et économiques ne cessent de s’exacerber entre l’Occident et l’Empire du Milieu.