Dans une annonce choc, le Premier ministre albanais Edi Rama a déclaré que le célèbre réseau social TikTok serait interdit dans le pays pendant au moins un an à compter de début 2025. Lors d’une réunion avec des acteurs du système éducatif à Tirana, il a qualifié l’application de « voyou du quartier » qu’il faut « chasser ».
Cette suspension controversée intervient peu après le décès tragique d’un adolescent de 14 ans lors d’une rixe liée à un conflit né sur les réseaux sociaux, qui a suscité un vif débat national sur leur impact chez les jeunes. En parallèle de l’interdiction de TikTok, le gouvernement compte lancer des programmes éducatifs pour « servir à l’éducation des élèves et aider les parents à suivre le parcours de leurs enfants », selon M. Rama.
Un succès fulgurant qui s’accompagne de vives critiques
Avec plus d’un milliard d’utilisateurs actifs, TikTok rencontre un succès phénoménal, particulièrement auprès des jeunes, séduits par son format de vidéos ultra-courtes en défilement continu. Selon un rapport de We Are Social, les utilisateurs d’Android y passaient en moyenne 34 heures par mois en 2024, surpassant ainsi tous ses concurrents en termes de capacité à capter l’attention.
Mais cette ascension fulgurante s’accompagne de nombreuses polémiques à travers le monde. Ses détracteurs accusent l’application d’enfermer ses utilisateurs dans des bulles de contenus via un algorithme opaque, et de favoriser la propagation de désinformation et de contenus inappropriés, surtout auprès des plus jeunes.
Des controverses mondiales et des interdictions dans plusieurs pays
L’Albanie n’est pas le premier pays à sévir contre TikTok. L’application est bannie depuis 2020 en Inde, suite à des affrontements meurtriers à la frontière chinoise. Elle fait l’objet d’une interdiction pour les adolescents en Australie et d’accusations d’espionnage aux États-Unis.
Dans l’Union européenne, une enquête vient d’être ouverte concernant de possibles ingérences étrangères dans l’élection présidentielle annulée en Roumanie. Le Premier ministre albanais a d’ailleurs souligné la différence de contenu présenté par TikTok en Chine, orienté vers l’éducation et la préservation des traditions, et en dehors, où l’on ne verrait que « des saletés et de la boue ».
Quelle efficacité pour cette mesure radicale ?
Si l’objectif affiché est de protéger la jeunesse albanaise des effets délétères de TikTok, l’efficacité réelle de cette interdiction d’un an reste à prouver. Des voix s’élèvent pour souligner le risque de voir les jeunes se tourner vers d’autres plateformes, potentiellement tout aussi problématiques.
Plutôt que la censure, il faudrait miser sur l’éducation aux médias et un meilleur accompagnement parental dans les usages numériques des ados.
Une psychologue spécialisée dans les comportements adolescents
Les programmes éducatifs promis par le gouvernement en parallèle seront donc scrutés de près. L’enjeu : offrir aux jeunes Albanais les clés pour une utilisation raisonnée et critique des réseaux sociaux, au-delà de la seule interdiction de TikTok. Un défi de taille, à l’heure où le numérique imprègne toujours plus le quotidien et la construction identitaire des nouvelles générations.