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L’affaire Grégory, 40 ans après : le mystère reste entier

L'affaire Grégory, l'un des faits divers les plus médiatisés en France, fête ses 40 ans. Malgré le temps qui passe, le meurtrier du petit garçon de 4 ans reste inconnu. Retour sur une enquête aux multiples rebondissements qui n'a pas livré tous ses secrets.

16 octobre 1984. Le corps sans vie du petit Grégory, 4 ans, est découvert ligoté dans la Vologne, une rivière des Vosges. C’est le début d’une affaire qui va passionner et diviser la France pendant des décennies. 40 ans après les faits, le meurtrier court toujours et l’énigme reste entière.

Retour sur une enquête chaotique

Dès les premiers jours de l’enquête, les zones d’ombre s’accumulent. Une lettre anonyme revendique le meurtre, signée d’un mystérieux “corbeau” qui harcèle la famille Villemin. Les soupçons se tournent rapidement vers Bernard Laroche, cousin du père de Grégory. Mis en examen, il est finalement relâché, faute de preuves.

Mais en mars 1985, coup de théâtre : Jean-Marie Villemin, le père de Grégory, abat Bernard Laroche d’un coup de fusil, persuadé de sa culpabilité. Un drame qui n’éclaire en rien cette affaire déjà bien opaque.

La justice a été complètement lamentable. Le juge d’instruction était incompétent.

– Maître Thierry Moser, avocat historique de l’affaire

Les enquêteurs se tournent alors vers Christine Villemin, la mère de Grégory. Inculpée en juillet 1985, elle sera finalement blanchie en 1993, après des années de procédure chaotique et de rebondissements.

L’enquête est transférée à Dijon en 1987. Mais les couacs s’enchaînent : expertises ratées, pistes négligées, aveux rétractés… Le doute s’installe, les pistes s’embrouillent. Le juge chargé de l’affaire à l’époque, Jean-Michel Lambert, ne survivra pas à cet échec : il se suicide en 2017.

L’ADN, nouvel espoir ?

Aujourd’hui, 40 ans après le drame, l’affaire Grégory n’a toujours pas livré tous ses secrets. Mais les progrès de la science laissent entrevoir de nouveaux espoirs. En mars 2023, de nouvelles expertises ADN ont été ordonnées, sur des traces découvertes à l’époque des faits.

Des analyses poussées que les technologies de l’époque ne permettaient pas. La méthode de la “fréquence vocale”, sorte d'”ADN de la voix”, pourrait aussi être utilisée sur les appels du corbeau. Des techniques avant-gardistes qui demandent du temps, mais pourraient faire parler de vieux indices.

Imaginer qu’une expertise va tout à coup trancher le nœud gordien est illusoire. C’est un élément supplémentaire à d’autres éléments.

– Philippe Astruc, procureur général de Dijon

Car les enquêteurs en sont persuadés : des témoins, voire le coupable, sont peut-être encore en vie. Les langues pourraient enfin se délier au crépuscule d’une vie.

Une affaire devenue mythe

Au-delà du fait divers sordide, l’affaire Grégory est devenue un véritable mythe. Ce tragique destin et ses zones d’ombre alimentent depuis 40 ans une fascination morbide, à la lisière du voyeurisme.

“Un anéantissement total”, résume Jean-Marie Villemin, le père de Grégory, dans un récent roman graphique sur l’affaire. Un drame familial et un fiasco judiciaire devenus objets médiatiques et culturels.

Chaque rebondissement a été scruté, analysé, disséqué par des armées de journalistes, écrivains, réalisateurs ou simples curieux, transformant une tragédie intime en feuilleton national. Une affaire hors-norme qui continue de passionner et d’interroger notre rapport au fait divers.

La quête de vérité

Malgré le temps qui passe et les obstacles, la quête de vérité se poursuit. Les parents de Grégory, soutenus par leurs avocats, refusent d’abandonner. Eux qui ont déjà tout perdu espèrent qu’un jour, enfin, la justice passera.

On le doit à un petit garçon, à des parents. Essayer de découvrir la vérité n’est jamais un acharnement.

– Philippe Astruc, procureur général de Dijon

40 ans après, le coupable se terre toujours dans l’ombre. Mais les progrès de la science et l’opiniâtreté des enquêteurs laissent encore une chance, même infime, d’élucider un jour ce crime qui a bouleversé la France. Pour qu’enfin, Grégory puisse reposer en paix, et sa famille tourner la page de ce cauchemar éveillé.

L’affaire Grégory restera comme l’un des plus grands mystères criminels de notre époque. Un fait divers devenu fait de société, miroir troublant de nos fascinations et de nos parts d’ombre. La faute d’une justice mal-mené ? D’une époque avide de tragédies ? Ou d’un coupable qui aura réussi le crime parfait ? Seul l’avenir nous le dira. En attendant, l’énigme perdure, et continue de nous questionner sur ce que ce drame dit de nous.

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