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Lac Tchad : La Navigation Va Enfin Reprendre Après 9 Ans

Après neuf années de fermeture totale, la navigation sur le lac Tchad est sur le point de reprendre. Le nouveau commandant de la Force multinationale mixte promet une sécurisation rapide des 17 km de couloirs maritimes… mais les jihadistes accepteront-ils la défaite aussi facilement ?

Imaginez un lac immense, autrefois poumon économique de quatre pays, réduit à une zone de guerre où plus aucun bateau civil n’ose s’aventurer depuis 2016. C’est la réalité du lac Tchad jusqu’à très récemment.

Aujourd’hui, un vent d’espoir souffle sur ces eaux troublées. Le nouveau commandant en chef de la Force multinationale mixte (FMM) vient de faire une annonce qui pourrait changer la vie de millions de personnes vivant autour du bassin.

Une priorité absolue : rouvrir les couloirs navigables

Le général nigérian Saidou Tanko Audu, 56 ans et trente années de carrière militaire derrière lui, a pris les rênes de la FMM mi-novembre. Dès sa première visite de terrain, il a été clair : la sécurisation des voies d’eau est sa mission numéro un.

Entre le Tchad et le Nigeria, 17 kilomètres de chenaux stratégiques doivent être totalement nettoyés de toute présence jihadiste. Déjà, selon ses déclarations, entre quatre et cinq kilomètres sont considérés comme sûrs. Le reste devrait suivre très rapidement.

« Je veillerai à ce que les choses soient faites le plus rapidement possible »

Général Saidou Tanko Audu, commandant en chef de la FMM

Pourquoi cette réouverture est-elle tant d’importance ?

Le lac Tchad n’est pas seulement une étendue d’eau. C’est une artère vitale. Poissons, commerce de céréales, bétail, sel : tout transitait autrefois par bateau entre le Nigeria, Tchad, Cameroun et (jusqu’à récemment) Niger.

Depuis la fermeture des voies navigables en 2016, les populations riveraines ont vu leur niveau de vie s’effondrer. Les prix ont explosé, les pénuries se sont multipliées et l’insécurité alimentaire a gagné du terrain.

La reprise de la navigation, même partielle, permettrait de :

  • Relancer immédiatement le commerce transfrontalier
  • Faire baisser les prix des produits de première nécessité
  • Redonner du travail à des milliers de pêcheurs et de transporteurs
  • Faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire

Un objectif ambitieux : éradiquer la menace jihadiste pour de bon

Au-delà de la simple réouverture des routes maritimes, le général Audu veut frapper fort. Son discours est sans ambiguïté : il s’agit de « se débarrasser de Boko Haram et de toute activité criminelle autour du lac Tchad pour de bon ».

Le lac est devenu, au fil des années, un sanctuaire pour deux groupes particulièrement dangereux : la faction historique de Boko Haram et l’État islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP). Les îles et les marécages offrent des cachettes idéales.

Pour atteindre son objectif, le commandant mise sur deux leviers complémentaires :

  1. Une pression militaire continue et coordonnée entre les pays encore membres
  2. Une main tendue aux combattants prêts à déposer les armes

« Je les invite à déposer les armes. Une fois qu’ils se seront rendus, nous ne retiendrons rien contre eux »

Cette politique de reddition volontaire a déjà porté ses fruits par le passé au Nigeria. Reste à voir si elle fonctionnera dans ce contexte multinational.

Un contexte régional fragilisé par le retrait du Niger

La tâche du général Audu se complique depuis mars 2025 : le Niger a officiellement quitté la Force multinationale mixte. Les tensions politiques entre Niamey et ses voisins ont eu raison d’une coopération pourtant essentielle.

Conséquence directe : un trou béant sur le flanc est du lac. Les jihadistes peuvent désormais circuler plus facilement entre les zones sous contrôle nigérien et les secteurs encore surveillés par la FMM.

Pourtant, le commandant refuse de se laisser abattre. Il mise sur une coordination renforcée entre le Nigeria, le Tchad et le Cameroun pour combler ce vide.

Les premiers signes encourageants sur le terrain

Sur place, les militaires rapportent une baisse sensible des accrochages ces dernières semaines. Les patrouilles fluviales se multiplient. Les pêcheurs, d’abord méfiants, commencent à retourner sur certaines zones récemment sécurisées.

Un habitant de Baga Sola, interrogé sous couvert d’anonymat, confiait récemment : « On commence à revoir des pirogues au loin. C’est la première fois depuis des années. »

Ces petits signes du quotidien sont peut-être les plus parlants. Ils montrent que la dynamique est en train de s’inverser, lentement mais sûrement.

Vers un lac Tchad apaisé : rêve ou réalité imminente ?

Personne n’ose encore parler de victoire définitive. Les groupes jihadistes ont prouvé par le passé leur capacité de résilience. Mais pour la première fois depuis longtemps, les populations du bassin du lac Tchad entrevoient concrètement la fin du tunnel.

Si le général Audu tient ses promesses, les bateaux pourraient à nouveau sillonner le lac d’ici quelques mois. Et avec eux, le retour progressif à une vie normale pour des millions de personnes.

Un défi immense, mais qui, pour une fois, semble à portée de main.

En résumé : la sécurisation des 17 km de voies navigables entre Tchad et Nigeria est en cours d’achèvement. L’objectif : relancer l’économie régionale et couper les vivres aux groupes armés. Un tournant possible pour toute la région du bassin du lac Tchad.

Le compte à rebours est lancé. Reste à espérer que cette fois, la lumière au bout du tunnel ne s’éteigne pas.

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