En ce week-end de la Toussaint, les Français seront nombreux à se rendre dans les cimetières pour fleurir les tombes de leurs proches disparus. Et comme chaque année, le chrysanthème s’impose comme la fleur incontournable de cette période de recueillement. Mais pourquoi cet amour indéfectible pour cette fleur aux airs de pompon coloré ? Plongeons ensemble dans les origines de cette tradition bien ancrée dans l’Hexagone.
Une tradition qui remonte à la Grande Guerre
Si le chrysanthème est devenu le symbole floral de la Toussaint, c’est en grande partie grâce à Raymond Poincaré. En effet, en 1919, celui qui était alors président de la République a encouragé les Français à fleurir les tombes des soldats morts au combat lors de la Première Guerre mondiale. Et c’est tout naturellement que le choix s’est porté sur le chrysanthème, fleur de l’automne par excellence, dont les couleurs chaudes et réconfortantes évoquent à merveille le souvenir et la mélancolie.
Un succès qui ne se dément pas malgré la hausse des prix
Aujourd’hui encore, plus d’un siècle après l’appel de Raymond Poincaré, le chrysanthème reste la star incontestée des fleuristes à l’approche du 1er novembre. Il faut dire que son prix attractif n’est pas étranger à ce succès : comptez en moyenne 9,10 euros pour une grosse fleur et environ 4 euros pour une petite. Des tarifs abordables qui séduisent de nombreux Français soucieux de rendre hommage à leurs défunts sans pour autant se ruiner.
Cependant, comme beaucoup d’autres produits, le chrysanthème n’échappe pas à l’inflation. Selon les chiffres de l’Insee, son prix a augmenté de 10% depuis 2019. Une hausse significative qui s’explique notamment par l’envolée des coûts de production et de transport, mais qui ne semble pas pour autant décourager les acheteurs. Preuve que la valeur symbolique de cette fleur dépasse de loin son simple prix.
Des fleurs majoritairement importées des Pays-Bas
Saviez-vous que le chrysanthème est la deuxième fleur la plus vendue en France, juste derrière la rose ? Chaque année, ce sont ainsi près de 30 millions de chrysanthèmes qui s’arrachent dans l’Hexagone, aussi bien chez les fleuristes qu’en grandes surfaces. Un marché colossal qui profite en grande partie aux producteurs néerlandais, lesquels trustent près de 80% des importations françaises.
Car oui, aussi surprenant que cela puisse paraître, la grande majorité des chrysanthèmes vendus dans nos contrées ne sont pas cultivés sur notre sol. Malgré quelques exploitations notables dans le Maine-et-Loire ou encore en Saône-et-Loire, la filière française peine à rivaliser avec les mastodontes bataves, lesquels bénéficient d’un savoir-faire et d’infrastructures sans égal. Un constat quelque peu amer pour les défenseurs du « produire local » mais qui n’entame en rien la popularité de cette fleur si particulière aux yeux des Français.
La fleur, c’est le cœur qui s’exprime à ciel ouvert.
– Pierre Grimal, historien français
Un rituel chargé de sens et d’émotion
Au-delà de son aspect purement décoratif, fleurir une tombe à la Toussaint revêt une dimension symbolique forte. C’est une façon de maintenir le lien avec ceux qui nous ont quittés, de leur témoigner notre affection par-delà la mort. Un geste simple mais ô combien chargé de sens, qui permet à chacun d’exprimer son chagrin, sa nostalgie, mais aussi sa reconnaissance envers ces êtres chers qui ont marqué notre existence.
Dans une société où le rapport à la mort reste souvent tabou, ce rituel ancestral apparaît comme un moment privilégié pour se recueillir, se souvenir et transmettre la mémoire familiale aux plus jeunes générations. Une parenthèse hors du temps propice à l’introspection et au partage, que beaucoup de Français ne manqueraient pour rien au monde.
Une tradition bien vivace malgré l’évolution des mentalités
Si la ferveur autour du chrysanthème ne faiblit pas, c’est aussi parce que cette fleur a su s’adapter aux nouvelles aspirations de la société. Fini le temps des bouquets tristes et austères : aujourd’hui, les fleuristes rivalisent de créativité pour proposer des compositions originales et colorées, mêlant différentes variétés de chrysanthèmes pour un résultat des plus éclatants. De quoi séduire une clientèle en quête de modernité, sans pour autant renier l’esprit de la tradition.
Car s’il est une chose que les Français aiment par-dessus tout, c’est bien perpétuer leurs rituels ancestraux tout en les actualisant au gré des époques. Un savant équilibre entre héritage et innovation que le chrysanthème incarne à merveille, et qui lui assure de belles perspectives d’avenir dans le cœur des Français.
Alors que vous vous apprêtez peut-être à fleurir la tombe d’un proche en ce week-end de la Toussaint, prenez le temps de contempler ces chrysanthèmes aux mille nuances. Et laissez-vous porter par la douce nostalgie qu’ils éveillent en vous. Car au-delà d’une simple fleur, c’est toute une part de notre identité collective qui s’exprime à travers ces pétales chatoyants. Un héritage précieux qu’il nous appartient de chérir et de transmettre, pour que jamais ne se fane la mémoire de ceux qui nous ont tant donné.