C’était le feuilleton sportif de l’automne dernier. La star camerounaise de NBA Joel Embiid, élu meilleur joueur de la saison, avait le choix entre trois sélections pour les prochains Jeux olympiques : le Cameroun, son pays natal, la France qui lui a accordé la nationalité en juillet 2022, et les États-Unis où il réside depuis son adolescence. Alors que l’équipe de France semblait tenir la corde, le pivot des Sixers de Philadelphie a finalement opté pour Team USA, créant la surprise.
Dans une interview fleuve accordée ce samedi au New York Times, Joel Embiid est revenu en détails sur les coulisses de ce choix cornélien. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il n’y va pas avec le dos de la cuillère concernant l’approche française dans ce dossier.
Un “ultimatum” mal vécu côté français
Le joueur aux trois passeports explique s’être “senti un peu bousculé” par le camp français pour prendre sa décision. “Je voulais prendre le plus de temps possible, et le fait que la France ait voulu décider de la date limite n’a pas aidé”, confie-t-il au quotidien new-yorkais. Une échéance qu’il aurait découverte “sur Twitter”, sans en avoir été informé au préalable, ce qui l’a visiblement froissé.
À l’inverse, Embiid salue l’attitude des États-Unis qui lui ont laissé tout le temps nécessaire. “Ils m’ont dit : prenez le temps qu’il vous faut. On serait ravis de vous avoir, mais ce n’est pas grave si vous prenez une autre décision”, relate-t-il. Une différence d’approche qui a semble-t-il pesé dans la balance.
Coup de fil à Macron et question épineuse
Le natif de Yaoundé raconte également avoir eu un échange téléphonique avec Emmanuel Macron en personne pendant sa réflexion. Après un premier appel en absence d’un numéro masqué, il a reçu un SMS du président français lui demandant de le rappeler. “J’ai compris ce qu’il se passait”, sourit-il.
S’il évoque une “conversation agréable” avec le chef de l’État, Joel Embiid affirme avoir profité de l’occasion pour aborder un sujet qui lui tient à cœur : les relations compliquées entre la France et le Cameroun. “Je lui ai dit que ça me préoccupait beaucoup, même aujourd’hui il se passe beaucoup de choses là-bas”, rapporte-t-il en référence au lourd passé colonial.
Il y a beaucoup de résistance sur place, ça va jusqu’à la volonté d’expulser les Français, parce qu’il y a eu tant d’années d’oppression.
Joel Embiid au New York Times
Un paramètre géopolitique qu’Embiid a visiblement pris en compte dans son choix, lui qui a encore de la famille au Cameroun. “Je veux qu’ils soient en sécurité, et les relations entre la France et le Cameroun ou l’Afrique en général ne sont pas bonnes”, souligne-t-il sans détour.
L’ombre du Cameroun plane
Dans cet entretien à cœur ouvert, le pivot aux 4 sélections d’étoiles NBA ne cache pas que son premier choix aurait été de porter le maillot du Cameroun si les “Lions indomptables” s’étaient qualifiés pour les JO. Un rêve d’enfant qui s’est envolé, ouvrant la voie au casse-tête entre Bleus et Team USA.
Des confidences qui ne manqueront pas de faire réagir à un an des Jeux de Paris. Avec Joel Embiid dans leur rang, les États-Unis s’affirment plus que jamais comme les grandissimes favoris pour l’or olympique. Un statut renforcé par cette bataille diplomatico-sportive remportée face à la France sur le dossier brûlant de la naturalisation du phénomène de NBA. Un revers qui tombe au plus mal pour des Bleus en quête d’un exploit à domicile.