Lors d’une visite à Ankara ce vendredi, la ministre allemande des Affaires étrangères Annalena Baerbock a mis en avant l’importance cruciale de la sécurité du peuple kurde pour l’avenir de la Syrie. Selon elle, garantir la sécurité des Kurdes est un élément clé pour permettre à la Syrie de connaître « un avenir libre et sûr ». Cette prise de position intervient dans un contexte régional tendu, marqué par les combats entre forces turques et kurdes dans le nord syrien.
Les Kurdes, acteurs incontournables du puzzle syrien
Représentant environ 10% de la population syrienne, les Kurdes ont joué un rôle majeur dans la lutte contre le groupe État islamique ces dernières années, notamment à travers les Forces démocratiques syriennes (FDS). Cette alliance de combattants, dominée par les Kurdes et soutenue par les États-Unis, contrôle de vastes territoires dans le nord et l’est du pays.
Mais cette montée en puissance des forces kurdes inquiète la Turquie voisine, qui y voit une menace pour sa propre sécurité. Ankara considère en effet les FDS comme une extension du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), un groupe classé terroriste par la Turquie et ses alliés occidentaux. Ces derniers jours, les tensions sont montées d’un cran avec le déclenchement d’affrontements entre combattants pro-turcs et forces kurdes, faisant craindre une nouvelle escalade.
L’Allemagne appelle à la retenue
Face à ces développements préoccupants, la cheffe de la diplomatie allemande a tenu à lancer un appel au calme et à la désescalade. Tout en affirmant comprendre les préoccupations sécuritaires « légitimes » de la Turquie, Annalena Baerbock a mis en garde contre les dangers d’une escalade avec les Kurdes en Syrie :
« J’ai dit très, très clairement aujourd’hui que nos intérêts communs en matière de sécurité ne doivent pas être mis en péril par une escalade avec les Kurdes en Syrie ».
Annalena Baerbock, ministre allemande des Affaires étrangères
La ministre a également souligné les risques qu’une offensive turque ne profite en définitive qu’aux jihadistes de l’État islamique, menaçant la sécurité de la Syrie, de la Turquie mais aussi de l’Europe. Un point de vue qui tranche avec celui exprimé par son homologue turc Hakan Fidan, pour qui « le PKK et le YPG ne représentent pas le peuple kurde ».
Trouver un équilibre pour l’avenir de la Syrie
Au-delà de la question kurde, la visite d’Annalena Baerbock à Ankara a aussi été l’occasion d’aborder l’avenir politique de la Syrie, alors que les rebelles islamistes poursuivent leur offensive contre le régime de Bachar el-Assad. Tout en se disant prête à juger les nouveaux dirigeants sur « leurs actes », la ministre allemande a mis en garde contre un « ordre islamique radical » qui ne pourrait que replonger le pays dans la violence.
Pour Berlin, la priorité reste de préserver l’intégrité territoriale de la Syrie et d’empêcher qu’elle ne devienne « le jouet de puissances étrangères ou une expérience de forces radicales ». Un défi de taille alors que le pays reste plus que jamais tiraillé entre intérêts divergents, sur fond de profondes fractures communautaires.
Dans ce contexte, la sécurité et les droits du peuple kurde apparaissent comme un enjeu central pour l’avenir du pays. Mais trouver un équilibre entre les aspirations des Kurdes, les inquiétudes de la Turquie et la nécessité de préserver la stabilité régionale s’annonce comme une équation particulièrement complexe. Il y faudra sans doute encore beaucoup de diplomatie et de compromis de la part de tous les acteurs impliqués.