Une saga judiciaire à rebondissements vient de connaître son épilogue sur l’île de Malte. Au cœur de l’affaire, le prince Paul de Roumanie, arrêté fin avril sur le territoire maltais en vertu d’un mandat d’arrêt européen émis par la justice roumaine. Condamné dans son pays à plus de trois ans de prison ferme pour trafic d’influence, le prince s’était réfugié en France. Mais son passage à Malte pour une cérémonie officielle lui a valu d’être appréhendé par les autorités locales. Cependant, contre toute attente, la justice maltaise a décidé ce lundi de le libérer définitivement, refusant de le remettre à la Roumanie.
Retour sur une arrestation qui a fait grand bruit
L’arrestation du prince Paul Philip Al Romaniei, alias Paul de Roumanie, le 29 avril dernier à Malte n’était pas passée inaperçue. Et pour cause : descendant du roi Carol II qui a régné sur la Roumanie de 1930 à 1940, le prince de 76 ans avait fui son pays natal après sa condamnation en 2020 à trois ans et quatre mois de prison. Son tort : avoir participé à une entente visant à récupérer des propriétés qu’il revendiquait en Roumanie en tant qu’héritier de la famille royale. Une demande jamais satisfaite par les autorités roumaines.
C’est donc en France que le prince avait trouvé refuge ces dernières années. Il avait même obtenu gain de cause fin 2023 devant la justice française qui avait rejeté l’exécution du mandat d’arrêt roumain sur le territoire. Mais son arrestation à Malte, où il était de passage pour un événement officiel, a remis une pièce dans la machine judiciaire. Placé en détention pendant plus de deux mois, il avait finalement été libéré début juillet sous caution, dans l’attente d’une décision sur son éventuelle extradition.
La justice maltaise refuse l’exécution du mandat d’arrêt européen
C’est cette décision qu’a rendu ce lundi la justice de Malte. Et elle est sans appel : le prince Paul ne sera pas remis aux autorités roumaines. « Sa libération met fin à un acharnement judiciaire à son égard », s’est félicitée son avocate Miriame Laïchi. Le prince devrait ainsi pouvoir rentrer en France dans les prochains jours.
Pour motiver sa décision, qui fait suite à un jugement de la Cour de Justice de l’Union Européenne fin juillet, la justice maltaise a rappelé l’importance de préserver les droits fondamentaux du prince. Un argument qui passe mal du côté de la Roumanie. La ministre de la Justice Alina Gorghiu a vivement dénoncé une décision « scandaleuse » et « inacceptable ».
Je proposerai au Premier ministre roumain que le gouvernement réagisse au niveau diplomatique à une violation aussi flagrante de la décision de la Cour de justice de l’Union Européenne.
Alina Gorghiu, ministre roumaine de la Justice
Paul de Roumanie, prince controversé
Derrière cette décision de justice, c’est tout le parcours atypique et controversé du prince Paul qui refait surface. Jamais reconnu officiellement par les autorités roumaines comme descendant du roi Carol II, il n’a eu de cesse de se battre pour faire valoir ce qu’il estime être ses droits sur le trône et sur des propriétés royales en Roumanie.
Des revendications qui lui ont valu les foudres de la justice de son pays, qui l’a reconnu coupable de trafic d’influence et de complicité. La condamnation portait notamment sur sa participation à une entente visant à récupérer des biens immobiliers revendiqués en tant qu’héritier de la famille royale. Des méthodes jugées illégales par la justice roumaine.
Quel avenir pour le prince ?
Avec cette libération définitive actée par la justice maltaise, c’est un nouveau chapitre qui s’ouvre pour Paul de Roumanie. S’il devrait pouvoir retrouver sa vie en France, loin des tracas judiciaires, son combat pour faire reconnaître son héritage royal en Roumanie semble plus que jamais compromis.
Reste à savoir quelle sera la réaction des autorités roumaines, qui n’ont pas mâché leurs mots après cette décision qu’elles jugent inacceptable. La ministre de la Justice a d’ores et déjà annoncé son intention de proposer une riposte diplomatique. De quoi laisser présager de nouveaux rebondissements dans ce dossier décidément hors norme.
En bref :
- Le prince Paul de Roumanie, condamné dans son pays, a été arrêté fin avril à Malte
- Malgré un mandat d’arrêt européen, la justice maltaise a refusé son extradition
- Une décision jugée « scandaleuse » par les autorités roumaines qui envisagent une riposte diplomatique
- Le prince controversé devrait pouvoir retrouver sa vie en France mais son combat pour faire valoir ses droits royaux en Roumanie semble plus compromis que jamais
L’affaire Paul de Roumanie illustre une fois de plus la complexité des enjeux juridiques et diplomatiques au sein de l’Union Européenne. Si l’exécution des mandats d’arrêt européens est censée être quasiment automatique, ce dossier montre que des considérations sur les droits fondamentaux peuvent encore faire obstacle. Une situation qui risque de raviver les tensions entre certains pays membres sur la question délicate de la coopération judiciaire.