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La Russie Revendique Siversk : Le Donbass Bascule-t-il ?

Jeudi, le chef d’état-major russe annonce à Poutine la « libération » de Siversk. Une ville de 11 000 habitants presque rayée de la carte. Derrière cette victoire symbolique, c’est tout l’axe Kramatorsk-Sloviansk qui tremble. Mais que s’est-il vraiment passé ces dernières semaines ? La suite va vous surprendre…

Imaginez une petite ville de 11 000 habitants, calme, presque oubliée des cartes touristiques. Et puis, en quelques mois, elle devient le centre de toutes les attentions militaires. C’est exactement ce qui vient d’arriver à Siversk, dans l’est de l’Ukraine.

Jeudi, en direct à la télévision russe, le général Valéri Guérassimov s’est présenté devant Vladimir Poutine pour lui annoncer sobrement : « La ville de Siversk a été libérée ». Le président a félicité les troupes. Pour Moscou, c’est une victoire majeure. Pour Kiev, c’est un nouveau coup dur sur un front qui plie depuis des semaines.

Siversk, le dernier verrou avant les grandes villes du Donbass

Située à une trentaine de kilomètres seulement à l’est de Kramatorsk et de Sloviansk, Siversk représentait depuis 2022 l’un des points d’ancrage les plus solides de la défense ukrainienne dans le secteur. Perdre cette position, c’est ouvrir une route directe vers les deux dernières grandes agglomérations encore contrôlées par Kiev dans le Donbass.

Avant la guerre, on y croisait des mineurs, des retraités, des enfants qui jouaient dans la cour de l’école n°3. Aujourd’hui, les photos satellite montrent un champ de ruines. Les immeubles éventrés, les cratères, les carcasses de véhicules blindés : le décor est celui d’une apocalypse lente.

Comment Siversk est-elle tombée ?

Les premières incursions russes autour de la ville datent de septembre 2025. Les unités motorisées ont commencé à encercler Siversk par trois côtés, profitant du repli forcé des brigades ukrainiennes plus au sud.

Pendant deux mois, les combats d’usure, bombardements massifs, assauts repoussés. Puis, entre novembre et début décembre, la ligne a craqué. Les analystes militaires parlent d’une percée décisive dans le secteur nord-est de la ville, suivie d’un effondrement progressif des défenses.

« La localité passe graduellement entre les mains de l’ennemi »

DeepState, site de cartographie proche de l’armée ukrainienne, 8 décembre 2025

Jeudi soir, la même source plaçait encore la moitié ouest de Siversk en « zone grise ». Moins de 24 heures plus tard, Moscou revendiquait la totalité de la ville.

Une dynamique russe qui s’accélère

Siversk n’est pas un cas isolé. Ces dernières semaines, les communiqués russes se sont multipliés :

  • Pokrovsk, nœud logistique majeur, revendiqué (démenti par Kiev)
  • Koupiansk et Vovtchansk dans la région de Kharkiv
  • Myrnograd, juste à côté de Pokrovsk
  • Kostiantynivka, place forte au sud
  • Gouliaïpolé, verrou historique plus au sud encore

En novembre, l’armée russe a réalisé sa plus importante progression territoriale en un seul mois depuis un an, selon les données vérifiées par l’Institut américain pour l’étude de la guerre (ISW).

Vladimir Poutine l’a d’ailleurs reconnu lui-même jeudi : « Je constate une bonne dynamique sur tous les axes. La libération des territoires se déroule de manière progressive, régulière. »

Pourquoi cette accélération maintenant ?

Plusieurs facteurs se combinent. L’hiver rigoureux complique la logistique ukrainienne. Les stocks de munitions et de pièces détachées s’amenuisent malgré l’aide occidentale. Les unités les plus expérimentées ont été usées par deux ans et demi de combats intensifs.

En face, la Russie a massivement mobilisé, remis à niveau son industrie de défense et bénéficie d’un afflux continu de matériel, y compris via ses alliés. Le rythme des frappes d’artillerie et de drones a littéralement saturé certaines portions du front.

Résultat : des brèches locales se transforment en percées, puis en effondrements sectoriels. Siversk en est l’exemple le plus récent.

Quelles conséquences pour Kramatorsk et Sloviansk ?

Avec Siversk aux mains russes, la distance qui sépare les forces de Moscou des deux grandes villes du nord du Donbass fond comme neige au soleil. Une trentaine de kilomètres, à peine, sur un terrain relativement plat.

Les autorités ukrainiennes ont déjà commencé à évacuer les civils les plus vulnérables. Les fortifications autour de Kramatorsk, construites dès 2014, vont être remises à l’épreuve. Mais après trois ans de guerre, les ressources humaines et matérielles ne sont plus celles de l’époque.

Certains observateurs estiment que l’hiver 2025-2026 pourrait être décisif pour le contrôle total du Donetsk oblast, l’un des objectifs affichés du Kremlin depuis le début de l’« opération militaire spéciale ».

Et pendant ce temps, la diplomatie…

Paradoxalement, alors que le front s’embrase, Kiev et Moscou négocient séparément avec Washington sur le plan américain de sortie de guerre présenté il y a plus de trois semaines.

Les détails restent flous, mais on parle d’un cessez-le-feu conditionnel, de garanties de sécurité, et d’un gel des lignes actuelles en échange d’une neutralité ukrainienne. Rien n’est acté. Les combats, eux, continuent sans relâche.

La prise de Siversk, comme celle de chaque village ou carrefour stratégique, pèse directement dans ces discussions. Chaque kilomètre gagné ou perdu modifie l’équation.

Ce que nous disent les images

Sur les réseaux, les vidéos tournées par les soldats russes montrent une ville fantôme. Des rues désertes, des façades criblées d’impacts, des bâtiments administratifs en flammes. Les drapeaux tricolores flottent déjà sur plusieurs points hauts.

Du côté ukrainien, on diffuse des images de résistance acharnée, de drones FPV qui continuent de frapper les colonnes blindées, de soldats épuisés mais déterminés. Deux récits qui s’opposent, une même réalité de destruction massive.

Dans les deux cas, Siversk n’est plus qu’un nom sur une carte militaire. Ses habitants, eux, ont fui ou vivent terrés dans des caves depuis des mois.

Et maintenant ?

La chute de Siversk n’est pas la fin de la guerre, loin de là. Mais elle marque un tournant symbolique et stratégique. Le Donbass, cette région industrielle martyrisée, se rapproche un peu plus du contrôle total russe.

Pour les habitants de Kramatorsk et de Sloviansk, l’angoisse monte. Pour les états-majors, les calculs s’affinent. Pour le reste du monde, c’est un rappel brutal que, près de trois ans après le début de l’invasion à grande échelle, le conflit est loin d’être gelé.

La neige tombe sur les ruines de Siversk. Et le front, lui, continue d’avancer.

(Article mis à jour le 11 décembre 2025 – les développements sur le front peuvent évoluer rapidement)

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