Qui l’eût cru ? La Russie, qui il y a peu voulait encore bannir le bitcoin, vient d’opérer un virage à 180 degrés sur les cryptomonnaies. Depuis le 1er septembre, les entreprises russes sont autorisées à utiliser ces actifs numériques pour régler leurs paiements internationaux. Un revirement qui en dit long sur la situation économique préoccupante du pays.
Le Kremlin pris à la gorge par les sanctions occidentales
Depuis l’invasion de l’Ukraine, la Russie croule sous une avalanche de sanctions économiques imposées par les pays occidentaux. Des restrictions qui commencent sérieusement à faire mal aux finances du pays. Face à cette pression, Moscou cherche désespérément des solutions pour contourner cet étau financier qui menace de l’asphyxier.
Selon une source proche du dossier, le Kremlin envisagerait les cryptomonnaies comme une échappatoire pour « développer des mécanismes de paiements alternatifs » et « diminuer sa dépendance au dollar américain ». Un pari risqué, quand on sait la volatilité et l’opacité qui caractérisent encore largement ces actifs numériques.
Un virage à 180° sur les cryptos
Pourtant, il y a encore quelques mois, la Banque centrale russe plaidait pour une interdiction pure et simple du bitcoin et des autres cryptomonnaies sur son territoire, les jugeant trop spéculatives et risquées. Mais voilà qu’en août dernier, Vladimir Poutine en personne a signé un décret autorisant leur utilisation pour les règlements internationaux.
Il ne faut pas rater ce tournant
Vladimir Poutine, sur le rôle croissant des cryptomonnaies dans l’économie mondiale
Un revirement spectaculaire qui illustre bien le désarroi des autorités russes face aux sanctions occidentales. Et une manière aussi de tendre la main aux nombreux acteurs des cryptos présents en Russie, qui figure parmi les 10 pays les plus actifs sur ce marché.
Un pari risqué aux bénéfices incertains
Mais cette ruée soudaine vers les cryptomonnaies est loin d’être une panacée pour l’économie russe. D’abord parce que leur nature décentralisée et peu régulée en fait des actifs par essence instables et spéculatifs. Difficile d’imaginer construire un système de paiement international pérenne et solide sur de telles bases.
Ensuite, rien ne garantit que les partenaires commerciaux de la Russie accepteront massivement ce type de paiements non conventionnels. Le risque est grand de se retrouver avec des actifs numériques non convertibles, sans réel pouvoir d’achat dans l’économie réelle. Une crypto-monnaie ne remplace pas une devise.
Vers un plus grand contrôle étatique des cryptos ?
Enfin, on peut s’interroger sur la volonté réelle du Kremlin d’embrasser pleinement le monde des cryptos et son idéologie libertarienne. Moscou voudra sans doute garder un contrôle étroit sur ces flux financiers alternatifs, quitte à dénaturer l’esprit originel décentralisé des cryptomonnaies.
Certains observateurs prédisent déjà la création d’une cryptomonnaie d’État, entièrement sous la coupe des autorités russes. Une perspective qui fait frémir les partisans de la décentralisation et de l’anonymat, valeurs fondatrices de l’univers crypto.
Un aveu de faiblesse plus qu’une solution miracle
Au final, ce virage russe à 180 degrés sur les cryptomonnaies ressemble plus à un aveu de faiblesse face aux sanctions qu’à une réelle solution de long terme pour l’économie du pays. Certes, cela pourrait offrir un répit temporaire à certaines entreprises russes asphyxiées. Mais le prix à payer pourrait être lourd.
Volatilité accrue du rouble, risque de bulle spéculative, perte de souveraineté monétaire, exposition au blanchiment et aux activités illicites… Les dangers liés à une adoption non maîtrisée des cryptomonnaies sont légion. Sans parler des possibles représailles des occidentaux, qui pourraient durcir encore leurs sanctions si ce canal de contournement s’avérait trop efficace.
Poutine joue donc un jeu dangereux en pariant soudainement sur les cryptos pour sauver son économie. Un pari de la dernière chance qui montre que Moscou est prêt à tout, quitte à se brûler les ailes, pour échapper à l’étreinte de plus en plus étouffante des sanctions internationales. Reste à voir si ce virage osé sera payant ou au contraire contre-productif pour le maître du Kremlin, lui-même de plus en plus dos au mur.