Face à la menace grandissante d’une guerre hybride orchestrée par la Russie, la Pologne sonne l’alerte au sein de l’Union européenne. Varsovie, qui vient de prendre la présidence tournante de l’UE, appelle les Vingt-Sept à faire preuve de davantage de fermeté et d’unité pour contrer cette stratégie de déstabilisation aux multiples facettes.
La migration comme arme de déstabilisation
Au cœur des préoccupations polonaises : l’instrumentalisation des flux migratoires par la Russie et son allié bélarusse. Selon Varsovie, Moscou et Minsk agissent comme de véritables « gangs de passeurs », organisant l’acheminement de migrants d’Afghanistan, d’Irak ou encore d’Éthiopie vers la frontière polonaise.
Plus de 30 000 tentatives de franchissement illégal ont été recensées en 2024, forçant la Pologne à déployer des milliers de soldats le long des 186 km de clôture métallique érigée à la frontière bélarusse. Une situation intenable, dénoncent les autorités polonaises, qui accusent la Russie de chercher à faire pression et à semer le chaos au sein de l’UE.
Une réponse polonaise controversée
Face à cet afflux, la réaction des garde-frontières polonais est cependant pointée du doigt. L’ONG Human Rights Watch a dénoncé des refoulements « illégaux et parfois violents » de migrants, laissés dans des conditions très rudes. Un constat que tempère Varsovie, assurant porter secours à ceux en danger, tout en reconnaissant repousser les migrants ne souhaitant pas demander l’asile en Pologne.
« Nous sommes en danger, nous avons besoin de mesures d’exception »
Maciej Duszczyk, sous-secrétaire d’État polonais en charge des migrations
Un projet de loi controversé, qui autoriserait à restreindre temporairement le droit d’asile, est sur la table. Si l’UE n’y voit pas de violation de ses règles à condition d’une application « stricte », la Pologne entend bien profiter de sa présidence pour revoir plus largement la politique européenne en matière de migration et d’asile.
Désinformation et cyberattaques : les autres armes de la guerre hybride russe
Mais la guerre hybride menée par la Russie ne se limite pas à la question migratoire. Varsovie accuse également Moscou d’orchestrer une vaste campagne de désinformation visant à saper le soutien à l’Ukraine, ainsi qu’une série de cyberattaques ciblant les intérêts polonais. Le pays serait « le plus attaqué » d’Europe dans ce domaine, a affirmé le ministre polonais du Numérique.
Des actes de sabotage sont aussi pointés du doigt, qu’il s’agisse d’entraves au transport aérien ou de l’interruption de câbles et conduites sous-marins en mer Baltique, où l’OTAN a d’ailleurs lancé une mission de surveillance.
Renforcer les défenses et l’unité européennes
Pour contrer cette guerre hybride polymorphe, la Pologne mise sur un renforcement de ses capacités de défense, avec un projet à plus de 2 milliards d’euros pour fortifier sa frontière orientale. Mais Varsovie en appelle surtout à une réponse européenne, exhortant les Vingt-Sept à réagir fermement et de manière unie face à la menace.
Alors que les tensions avec Moscou n’ont jamais été aussi vives, la présidence polonaise de l’UE s’annonce cruciale pour définir une stratégie commune de résistance à cette guerre d’un nouveau genre. Face aux tentatives de déstabilisation russes, c’est la solidité et la cohésion du projet européen qui sont mises à l’épreuve. Un défi majeur pour une Union qui doit impérativement serrer les rangs.