Dans une Syrie déchirée par les conflits, la minorité alaouite vit aujourd’hui dans la peur des représailles. Depuis la chute du régime de Bachar el-Assad, issu de cette communauté, les alaouites craignent de devenir les cibles de violentes vengeances de la part des rebelles et de la majorité sunnite.
Une communauté longtemps favorisée par le pouvoir
Représentant environ 10% de la population syrienne, les alaouites ont longtemps bénéficié de la protection du clan Assad, lui-même issu de cette minorité religieuse. Occupant des postes clés dans l’armée et l’administration, ils étaient perçus par une partie de la population comme des privilégiés du régime.
Mais avec la chute brutale de Bachar el-Assad le mois dernier, la donne a changé. Les alaouites se retrouvent aujourd’hui vulnérables, craignant d’être pris pour cible par ceux qui veulent se venger des exactions commises par le régime déchu.
Des incidents de plus en plus fréquents
Selon des sources proches des communautés alaouites, les incidents se multiplient ces dernières semaines dans les fiefs de la minorité, notamment dans les provinces côtières de Lattaquié et Tartous. Des groupes armés, pour certains affiliés à d’anciens groupes rebelles, s’en prendraient aux alaouites, les accusant d’être des soutiens de l’ancien régime.
« Chaque jour, nous avons peur pour nos vies. Des hommes armés viennent menacer nos familles, nous accusant d’être des ‘chiens d’Assad’. Ils veulent se venger, mais nous sommes des civils, pas des combattants ! »
témoigne un habitant de Jablé qui a requis l’anonymat.
Face à la menace, certains alaouites tentent de fuir vers des zones plus sûres, notamment vers la province de Tartous où la communauté est historiquement bien implantée. Mais beaucoup craignent que leur fuite ne fasse qu’attiser davantage la colère et les soupçons à leur égard.
Un avenir incertain pour la communauté
Malgré les appels au calme des nouvelles autorités syriennes, la situation des alaouites reste très précaire. Beaucoup redoutent que les prochains mois ne voient une escalade des violences communautaires, sur fond de vengeances et de règlements de comptes.
Pour tenter d’apaiser les tensions, des initiatives de dialogue intercommunautaire ont été lancées, notamment à Lattaquié. Mais la route vers une réconciliation nationale s’annonce longue et semée d’embûches, dans un pays profondément marqué par une décennie de guerre civile.
Un test pour la Syrie post-Assad
Au-delà du sort des alaouites, c’est la capacité de la Syrie post-Assad à tourner la page des divisions communautaires qui est en jeu. Les nouvelles autorités sauront-elles créer les conditions d’une coexistence pacifique entre les différentes composantes de la mosaïque syrienne ? C’est tout l’enjeu des prochains mois.
En attendant, la peur reste le sentiment dominant chez les alaouites de Syrie. Une peur qui dit toute la difficulté du chemin vers la paix et la réconciliation dans ce pays meurtri.