Dans l’est de la République démocratique du Congo, le groupe armé M23 ne cesse de gagner du terrain face aux forces gouvernementales, au prix de lourdes conséquences pour les populations civiles prises au piège des violences. Soutenu militairement par le Rwanda voisin selon de nombreuses sources, le mouvement rebelle vient de s’emparer de la localité stratégique de Minova, resserrant encore davantage son étau sur la ville de Goma.
Minova tombe aux mains des rebelles
Après des mois de crainte, les pires scénarios se confirment pour les quelque 65 000 habitants de Minova, cité enclavée entre le lac Kivu et les montagnes du Masisi dans la province du Sud-Kivu. Dans la matinée du lundi 30 janvier, les combattants du M23 ont investi la ville, échangeant des tirs nourris avec les soldats des FARDC qui tentaient de défendre leurs positions.
« Nous échangeons avec l’ennemi mais il a pris Minova », a reconnu un officier de l’armée congolaise cité par l’AFP. Cette nouvelle conquête confirme l’avancée fulgurante du M23 depuis sa résurgence fin 2021. Début janvier, le groupe s’était déjà emparé de Masisi-centre, la capitale du territoire éponyme située à 80 km à peine de Goma.
Goma de plus en plus menacée
Avec la chute de Minova, c’est un verrou stratégique qui saute sur la route de Goma. Jusqu’ici, la localité était un point crucial de ravitaillement vers la capitale provinciale via le lac Kivu. Désormais, les lignes de front se rapprochent dangereusement de la ville d’environ un million d’habitants.
Les affrontements font rage dans les collines de Sake, à seulement une vingtaine de kilomètres du centre. Les détonations résonnent jusqu’aux faubourgs de Goma, poussant des milliers d’habitants à fuir vers des zones plus sûres. Fin 2012, les rebelles du M23 avaient brièvement occupé la cité avant de se retirer sous la pression internationale.
Exode et crise humanitaire
Privés de leurs moyens de subsistance, encerclés par les combats, des dizaines de milliers de civils n’ont d’autre choix que l’exil. Depuis lundi, un flot ininterrompu de pirogues traverse le lac Kivu, débarquant des familles entières qui viennent grossir les rangs des déplacés s’entassant dans les camps de fortune en périphérie de Goma.
Nous continuons à recevoir les déplacés qui arrivent en masse. Nous avons déjà reçu plus de 100 ménages.
Ishara Kaziwa, chargé de protection du camp de Lushagala
Au cours des 3 dernières semaines, les hôpitaux de Goma ont accueilli plus de 200 blessés, en majorité des civils touchés par des balles ou des éclats d’obus, dont de nombreux enfants. Véritable défi logistique, leur prise en charge s’effectue dans des conditions précaires par des équipes médicales débordées.
Une poudrière régionale
Loin de se cantonner à un conflit interne, la guerre dans l’est congolais implique une multitude d’acteurs aux agendas contradictoires. Kigali nie farouchement tout soutien au M23, mais de nombreux rapports d’experts de l’ONU et d’ONG documentent l’appui apporté par l’armée rwandaise aux rebelles.
Ces tensions attisent un ressentiment anti-rwandais de plus en plus visible en RDC, comme l’illustrent les manifestations récurrentes à Kinshasa ou Goma. Une escalade militaire entre les deux voisins fait craindre une déflagration régionale aux conséquences potentiellement dévastatrices.
Malgré les appels au cessez-le-feu et les initiatives diplomatiques, une issue politique semble plus que jamais lointaine. Sur le terrain, le M23 poursuit son offensive tandis que les FARDC tentent de contenir son avancée. Au milieu de ce chaos, ce sont les populations civiles qui paient le prix fort de l’instabilité chronique gangrénant l’est de la RDC depuis près de 30 ans.
