L’élection présidentielle en Namibie a marqué un tournant historique, avec la victoire de Netumbo Nandi-Ndaitwah, devenant ainsi la première femme présidente du pays. Cette militante de longue date et figure politique influente a réussi à s’imposer dès le premier tour, malgré un scrutin marqué par des retards et des irrégularités dénoncées par l’opposition.
Issue du parti au pouvoir, la Swapo, qui dirige le pays depuis son indépendance en 1990, Mme Nandi-Ndaitwah a obtenu 57,31% des suffrages, selon les résultats officiels annoncés par la commission électorale. Son principal adversaire, Panduleni Itula, candidat de l’IPC, n’a recueilli que 25,50% des voix, un score bien en deçà de ses espérances.
Une campagne axée sur l’emploi et la stabilité
Pendant sa campagne, la nouvelle présidente s’est engagée à créer plus de 250.000 emplois en cinq ans, un défi de taille dans un pays où le chômage des jeunes atteint des niveaux alarmants. Elle a également insisté sur l’importance de la stabilité politique pour attirer les investissements étrangers, promettant de miser sur la « diplomatie économique ».
Militante de longue date, Mme Nandi-Ndaitwah a forgé son expérience politique pendant la lutte pour l’indépendance, passant notamment par la Russie dans les années 1970 où elle a été formée au sein du Komsomol, l’organisation de jeunesse du parti communiste soviétique. Connue pour ses positions conservatrices, elle est notamment partisane d’une législation stricte en matière d’avortement.
Un scrutin marqué par des dysfonctionnements
L’élection présidentielle et les législatives qui se tenaient simultanément ont été entachées de nombreux problèmes logistiques et techniques. Le premier jour du vote, de longues files d’attente interminables se sont formées, obligeant certains électeurs à renoncer après avoir patienté jusqu’à 12 heures.
Face à ces dysfonctionnements, le scrutin a dû être prolongé à deux reprises, notamment en raison d’une pénurie de bulletins de vote dans de nombreux bureaux. Malgré ces difficultés, la participation a atteint 76% selon la commission électorale, témoignant de l’attachement des Namibiens au processus démocratique.
L’opposition dénonce des « irrégularités » et conteste les résultats
Panduleni Itula, le principal opposant, n’a pas tardé à dénoncer ces élections « chaotiques », pointant du doigt de « multiples irrégularités ». Il a annoncé son intention de faire annuler le scrutin « selon les procédures prévues », estimant qu’il ne pouvait être qualifié de « libre, équitable et légitime ».
Plusieurs missions d’observation, dont celles de l’Union africaine et de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC), ont également souligné les problèmes rencontrés, évoquant des « retards délibérés » dans l’acheminement du matériel électoral et des pannes des tablettes électroniques servant à vérifier l’identité des électeurs.
Les défis de la nouvelle présidente
Au-delà de la controverse sur le déroulement du scrutin, la nouvelle présidente devra faire face à de nombreux défis. Malgré ses ressources minières abondantes, la Namibie reste l’un des pays les plus inégalitaires au monde, juste derrière l’Afrique du Sud. Le chômage massif des jeunes, qui représentent les deux tiers de la population, alimente les frustrations.
L’abondante activité minière ne se traduit pas vraiment par une amélioration des infrastructures, ni par des opportunités d’emploi.
Marisa Lourenço, analyste indépendante
Pour relancer l’économie et réduire les inégalités, Mme Nandi-Ndaitwah devra s’attaquer aux faiblesses structurelles du pays, en investissant dans l’éducation, les infrastructures et la diversification économique. Elle devra également œuvrer à renforcer les institutions démocratiques et à restaurer la confiance des citoyens dans le processus électoral.
Sur la scène internationale, la nouvelle présidente aura pour mission de renforcer les liens avec les partenaires clés de la Namibie, notamment les pays voisins d’Afrique australe et les puissances occidentales. Elle devra également défendre les intérêts du pays dans les enceintes régionales et internationales, tout en promouvant les valeurs démocratiques et le respect des droits humains.
Vers une réforme du système électoral ?
Face aux critiques sur l’organisation du scrutin, des voix s’élèvent pour réclamer une réforme en profondeur du système électoral namibien. Parmi les pistes évoquées figurent la modernisation des procédures d’inscription des électeurs, l’amélioration de la logistique électorale et le renforcement de l’indépendance de la commission électorale.
Ces réformes apparaissent d’autant plus nécessaires que la Namibie, souvent citée en exemple pour sa stabilité politique, a vu sa réputation ternie par les ratés de ce scrutin. Il reviendra à la nouvelle présidente de restaurer la confiance dans les institutions et de garantir l’intégrité des futures échéances électorales.
L’élection de Netumbo Nandi-Ndaitwah marque incontestablement une nouvelle ère pour la Namibie. Première femme à accéder à la magistrature suprême, elle incarne l’espoir d’un renouveau politique et d’un développement plus inclusif. Mais les défis sont immenses et les attentes de la population, en particulier des jeunes, sont élevées. Il lui faudra faire preuve de volonté politique et de capacité à rassembler pour répondre aux aspirations de ses concitoyens et construire une Namibie plus juste et prospère.