En ce dimanche décisif, les Moldaves sont appelés aux urnes pour élire leur président et prendre une décision lourde de conséquences : poursuivre le chemin européen initié ces dernières années ou renouer avec l’influence de Moscou. Ce double scrutin, scruté de près par les observateurs internationaux, se déroule dans un contexte tendu, sur fond de craintes d’ingérence russe et alors que la guerre fait rage chez le voisin ukrainien.
Maia Sandu, figure de proue de l’ancrage européen
Maia Sandu, la présidente sortante qui a résolument tourné son pays vers l’Union européenne, fait figure de favorite. Cette économiste de 52 ans, réputée pour son intégrité, est devenue un visage incontournable de la scène européenne. Cependant, les sondages prédisent qu’un second tour sera nécessaire le 3 novembre pour assurer sa réélection.
Lors de son vote ce matin dans la capitale Chisinau, Maia Sandu a souligné l’importance de ce scrutin :
Ce vote va déterminer notre destin pour de nombreuses décennies. C’est la volonté du peuple moldave qui doit s’exprimer, pas celle d’autres personnes, pas l’argent sale.
Maia Sandu, présidente sortante de Moldavie
Un référendum pour ancrer l’objectif européen dans la Constitution
Outre l’élection présidentielle, les Moldaves sont aussi consultés via un référendum pour inscrire l’objectif d’adhésion à l’Union européenne dans la Constitution. Un rempart jugé nécessaire face à l’influence russe par les autorités. Les négociations d’adhésion à l’UE ont été officiellement ouvertes en juin dernier et les sondages donnent le “oui” gagnant à 55%.
Pour de nombreux électeurs, comme Olga Cernega, économiste de 60 ans, ce vote est un choix décisif pour l’avenir :
Je suis venue donner ma voix pour la prospérité, la paix et le bien-être de notre pays.
Olga Cernega, électrice moldave
Des craintes d’ingérence russe
Alors que la Moldavie s’efforce de se rapprocher de l’Europe, la menace d’une ingérence russe plane sur le scrutin. Selon certaines sources, Moscou aurait dépensé près de 100 millions de dollars pour tenter d’influer sur le résultat des urnes, avec à la manœuvre l’oligarque Ilan Shor, réfugié en Russie après une condamnation pour fraude.
Les autorités moldaves ont mené une vaste opération ces derniers mois, avec 350 perquisitions et des centaines d’interpellations de suspects accusés de vouloir perturber le processus électoral pour le compte de la Russie. Un système “sans précédent” d’achat de votes, ciblant jusqu’à un quart des électeurs, a été révélé.
Le Kremlin a fermement rejeté ces accusations d’ingérence. Mais dans un bureau de vote de la commune de Varnita, proche de la région séparatiste pro-russe de Transnistrie où stationne une garnison de soldats russes, la méfiance est palpable. Nicolai, expert informatique de 33 ans, confie qu’il vaut mieux “garder le silence” pour éviter les problèmes.
Une opposition divisée et des appels à la “neutralité”
Face à Maia Sandu, aucun poids lourd mais une ribambelle de 10 candidats, pour la plupart considérés comme plus ou moins liés à Moscou derrière des discours de “neutralité”. Alexandr Stoianoglo, ex-procureur soutenu par les socialistes pro-russes pointe à 9%. De son côté, Renato Usatii, ancien maire de Balti, se présente comme le “seul candidat à n’être contrôlé ni par l’Est ni par l’Ouest”.
Les premiers résultats sont attendus dans la soirée, une heure après la fermeture des bureaux de vote. Le taux de participation s’élevait à 39% à 15h pour la présidentielle et 33% pour le référendum selon la Commission électorale.
Dans ce pays de 2,6 millions d’habitants pris en étau entre l’influence russe et les aspirations européennes, l’issue du scrutin déterminera la trajectoire pour les prochaines décennies. Un vote sous haute tension où la volonté des Moldaves devra s’imposer face aux ingérences extérieures.