Dans les prochains mois, la métropole nantaise va se lancer dans une opération hors-normes : démanteler un bidonville abritant 700 Roms à l’est de la ville, dans le secteur de la prairie de Mauves. L’objectif ? Accompagner ces populations vers des solutions de logement pérennes et mettre fin à des années de précarité. Un projet estimé à près de 50 millions d’euros sur 4 ans, qui soulève de nombreux défis pour la collectivité.
Un bidonville parmi les plus importants de France
Les 7 campements de fortune installés sur le site totalisent environ 700 occupants, dont 30 à 40% de mineurs. Composés de cabanes de fortune, caravanes et constructions légères, ils forment l’un des plus grands bidonvilles du territoire national. Une situation qui perdure depuis plusieurs années et que les autorités souhaitent désormais résoudre.
La Prairie de Mauves, prisée pour son cadre naturel en bord de Loire, va en effet accueillir un ambitieux pôle d’écologie urbaine à l’horizon 2031. Un projet qui vient bousculer le calendrier de l’évacuation, comme l’explique Robin Salecroix, vice-président de Nantes Métropole en charge de l’assainissement et de la politique de l’eau :
Ce pôle d’écologie urbaine doit être un accélérateur de la résorption de ces bidonvilles, du mieux vivre de ces populations
Robin Salecroix
Un projet social et urbain hors-normes
L’évacuation s’étalera sur 4 années à compter de l’été 2024 et mobilisera d’importants moyens. Près de 12 millions d’euros seront investis chaque année, tant pour l’accompagnement des familles que pour la sécurisation du site. La facture totale avoisinera les 50 millions d’euros. Un budget conséquent que la métropole espère partager avec l’État et l’Europe.
Au-delà de l’aspect financier, c’est un véritable défi humain et social qui attend les équipes mobilisées, comme le souligne François Prochasson, vice-président en charge du droit au logement :
Cet accompagnement nécessite d’être présent sur tous les terrains de la vie au quotidien : l’éducation, l’emploi, la santé, les solutions de logement adaptées, les questions de police justice, de l’action sociale…
François Prochasson
Il s’agira de construire des parcours d’insertion sur-mesure pour des familles qui, pour la plupart, n’envisagent pas de retour en Roumanie. Un travail de longue haleine pour permettre à ces populations de trouver leur place dans la société française.
Des défis multiples pour la métropole
Au-delà de la question centrale du relogement, de nombreux autres enjeux devront être pris en compte par la collectivité :
- La scolarisation des enfants et l’accès à l’éducation
- L’accompagnement vers l’emploi et la formation
- L’accès aux soins et à la couverture sociale
- La lutte contre les trafics et l’insécurité
- L’acceptabilité du projet par les riverains
Autant de problématiques qui nécessiteront une coordination renforcée entre les différents acteurs impliqués : services de la métropole, communes, associations, forces de l’ordre, acteurs de l’emploi et de l’insertion, etc.
Un test grandeur nature pour les politiques d’intégration
Au-delà du cas nantais, cette opération constitue un véritable test grandeur nature pour les politiques publiques d’intégration des populations roms. Souvent pointées du doigt pour leur inefficacité, elles se voient ici mises face à leurs responsabilités, avec des moyens conséquents.
La réussite de ce projet constituerait un signal fort et ouvrirait la voie à d’autres initiatives du même type sur le territoire. À l’inverse, un échec serait lourd de conséquences et renforcerait le sentiment d’impuissance des pouvoirs publics face à ces situations.
Une chose est sûre : l’évacuation de la Prairie de Mauves sera suivie de près, bien au-delà de la métropole nantaise. Elle dira beaucoup de la capacité de notre société à inclure ses membres les plus fragiles et à résorber ces poches de grande précarité. Un immense défi, aussi enthousiasmant que vertigineux.