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La Martinique rejetée dans sa quête du créole officiel

Un revers pour la Martinique : la justice annule la reconnaissance du créole comme langue co-officielle. Une décision qui soulève des questions sur l'identité et l'avenir linguistique de l'île. Quelles seront les prochaines étapes pour défendre le créole ?

La quête de la Martinique pour faire reconnaître le créole comme langue co-officielle aux côtés du français vient de subir un revers. Le tribunal administratif de Fort-de-France a annulé une délibération de la Collectivité territoriale de Martinique (CTM) datant de 2023, qui avait fait du créole la langue officielle de l’île. Une décision qui soulève des questions sur l’identité, le patrimoine linguistique et l’avenir du créole martiniquais.

Un texte adopté en 2023 par l’assemblée martiniquaise

En mai 2023, dans la foulée des célébrations du 175e anniversaire de l’abolition de l’esclavage en Martinique, l’Assemblée territoriale avait adopté un texte audacieux. Son article 1er proclamait le créole langue officielle de la Martinique, au même titre que le français. Une décision historique pour cette île des Antilles françaises, où le créole reste la langue maternelle d’une grande partie de la population.

Le préfet saisit la justice pour faire annuler la délibération

Mais cette avancée pour la reconnaissance du créole n’aura été que de courte durée. Le préfet de Martinique, Jean-Christophe Bouvier, garant du contrôle de légalité des actes des collectivités locales, avait rapidement mis en demeure la CTM de retirer sa délibération. Face au refus de l’institution martiniquaise, le représentant de l’État avait saisi le tribunal administratif pour faire annuler le texte.

L’usage du français s’impose aux personnes morales de droit public.

– Jugement du tribunal administratif de Fort-de-France

La Constitution et la loi invoquées pour justifier l’annulation

Et les juges administratifs lui ont donné raison. Dans leur décision rendue le 3 octobre 2024, ils s’appuient sur l’article 2 de la Constitution, qui fait du français la langue officielle de la République, ainsi que sur la loi du 4 août 1994 relative à l’emploi de la langue française. « L’usage du français s’impose aux personnes morales de droit public », tranchent-ils, concluant que la délibération de l’Assemblée de Martinique « méconnaît les dispositions » en vigueur.

Le droit d’utiliser le créole au quotidien n’est pas remis en cause

Le tribunal prend toutefois soin de préciser que son annulation « ne remet pas en cause le droit de tout un chacun d’utiliser le créole » dans la vie de tous les jours. Il rappelle également que le créole martiniquais bénéficie déjà du « statut de langue régionale », reconnu par la loi.

Une décision qui soulève des questions identitaires et linguistiques

Mais au-delà des aspects juridiques, cette décision de justice est lourde de sens pour la Martinique. Elle met en lumière les tensions entre l’affirmation d’une identité culturelle et linguistique propre et le cadre légal et constitutionnel français. Pour de nombreux défenseurs du créole, cette langue, née de la colonisation et de l’esclavage, est indissociable de l’histoire et de l’âme martiniquaises. Sa reconnaissance officielle était vue comme une étape majeure vers une plus grande autonomie culturelle.

Quelles perspectives d’avenir pour le créole martiniquais ?

La CTM, qui avait fait savoir son intention de se pourvoir en cassation devant le Conseil d’État suite à la suspension de sa délibération en novembre 2023, va-t-elle maintenant jeter l’éponge ? Ou bien de nouveaux combats juridiques et politiques se profilent-ils pour faire vivre le créole martiniquais dans l’espace public et officiel ?

Une chose est sûre : cette décision ne marque pas la fin des débats passionnés sur la place du créole dans la société martiniquaise. Car au-delà d’un simple enjeu linguistique, c’est bien la question de l’affirmation identitaire et de l’émancipation culturelle qui se joue. L’avenir du créole en Martinique reste à écrire, et nul doute que ses défenseurs ne sont pas prêts à rendre les armes.

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