Alors que l’Italie profite d’un boom du tourisme post-pandémie, la mafia italienne y voit une opportunité en or pour blanchir ses profits illicites. Selon un rapport publié par un institut de recherche, le crime organisé empoche actuellement plus de 3 milliards d’euros par an grâce au secteur touristique transalpin.
Et ce n’est qu’un début. Avec les grands événements prévus dans les prochaines années, comme le Jubilé de l’Église catholique en 2025 et les Jeux olympiques d’hiver de Milan-Cortina en 2026, les mafieux comptent bien gonfler encore plus leurs profits. Ces perspectives alléchantes « aiguisent l’appétit » des différents clans, d’après les experts.
Des entreprises vulnérables dans le collimateur
Pour infiltrer l’économie légale, les groupes criminels ciblent en priorité les entreprises du tourisme en difficulté financière. Hôtels, restaurants, bars, les proies ne manquent pas, surtout après les longs mois de fermeture dus au Covid-19.
D’après le rapport, près de 7000 entreprises seraient actuellement à risque, soit environ 15% des sociétés du secteur connaissant des problèmes de trésorerie ou d’endettement. Une aubaine pour la mafia, qui leur propose un « soutien » via des prêts à des conditions léonines. Impossible pour les victimes de refuser ou de s’en sortir.
Les mafias promettent la survie financière, couvrent les dettes et garantissent la liquidité, mais à un prix très élevé : le contrôle ou l’acquisition totale des entreprises.
Raffaele Rio, président de l’institut Demoskopika
Un système bien rodé
Via ce système de « l’aide sociale criminelle », les familles mafieuses étendent leur emprise sur les territoires et les entreprises. Elles utilisent ensuite ces sociétés sous contrôle pour blanchir l’argent issu de leurs trafics, tout en continuant d’étouffer les entrepreneurs avec l’usure et le racket.
Toute l’économie légale du pays s’en trouve asphyxiée. Impossible pour les entreprises « propres » de lutter à armes égales face à cette concurrence déloyale de l’économie souterraine.
Le Nord aussi touché
Si les racines des mafias se trouvent dans le Sud, avec la Camorra en Campanie, Cosa Nostra en Sicile ou la ‘Ndrangheta en Calabre, leurs tentacules s’étendent désormais à toute l’Italie. Dans les régions touristiques du Nord, elles ont ainsi engrangé près de 1,5 milliard d’euros en infiltrant le secteur, d’après les estimations de l’institut Demoskopika.
La ‘Ndrangheta, considérée comme la mafia la plus puissante du pays, s’adjuge à elle seule la moitié du « chiffre d’affaires » total du crime organisé dans le tourisme. Suivent la Camorra, Cosa Nostra et les groupes criminels des Pouilles.
Des événements très attendus
Avec la reprise du tourisme, les mafias comptent bien étendre encore leur emprise, en particulier en vue des grands événements à venir. Le Jubilé de l’Église catholique en 2025, qui devrait attirer des millions de pèlerins, et les Jeux olympiques d’hiver de Milan-Cortina en 2026 représentent des opportunités en or.
Contrats publics, investissements massifs dans les infrastructures, afflux de visiteurs : tous les ingrédients sont réunis pour une infiltration à grande échelle de l’économie légale. Les autorités italiennes se disent déterminées à contrer cette menace, mais la tâche s’annonce ardue face à la puissance financière et à l’enracinement des mafias.
Ce rapport alarmant met en lumière l’ampleur du défi à relever pour protéger le tourisme italien, secteur vital pour l’économie du pays. Il appelle à une vigilance accrue et une action coordonnée pour empêcher le crime organisé de gâcher la reprise et de gangrener toujours plus le tissu économique national.