Un rejet sans surprise. C’est ainsi que l’avocat d’Anders Behring Breivik, l’extrémiste de droite norvégien responsable de la mort de 77 personnes lors des attentats de 2011, a qualifié la décision de la justice de son pays. Cette dernière a en effet refusé mercredi d’accorder une libération conditionnelle à son client, malgré des « évolutions positives » constatées au fil des années.
Breivik, aujourd’hui âgé de 45 ans, avait déposé une nouvelle demande en ce sens après un premier échec en février 2022. Lors d’une audience en novembre dernier, qui s’est tenue dans le gymnase de la prison de Ringerike où il est incarcéré, il avait réaffirmé rejeter désormais la violence, un argument visiblement peu convaincant aux yeux des juges.
Retour sur une journée d’horreur
Le 22 juillet 2011 restera à jamais gravé dans la mémoire collective norvégienne. Ce jour-là, Anders Behring Breivik avait d’abord fait exploser une bombe près du siège du gouvernement à Oslo, faisant huit victimes. Puis, il s’était rendu sur l’île d’Utøya où il a froidement abattu 69 autres personnes, pour la plupart des adolescents, qui participaient à un camp d’été de la Jeunesse travailliste.
Un carnage qu’il justifiait par son opposition farouche au multiculturalisme, incarné selon lui par ses jeunes victimes. Un an plus tard, la justice le condamnait à 21 ans de prison, peine susceptible d’être prolongée tant qu’il reste considéré comme un danger pour la société.
Un risque de récidive toujours présent
Si le tribunal norvégien a noté des « évolutions positives » dans le comportement de Breivik au cours des années, il a estimé dans sa décision écrite que le risque de récidive était similaire à celui identifié lors de sa condamnation initiale en 2012. Un avis partagé par les psychiatres qui avaient examiné le terroriste en amont de l’audience.
Dans leur expertise, ils dépeignaient un individu atypique, présentant d’importants troubles de la personnalité et en qui on ne peut pas nécessairement faire confiance. Des conclusions peu compatibles avec une éventuelle remise en liberté.
Des provocations lors de l’audience
Lors de sa comparution en novembre, Breivik n’avait d’ailleurs pas hésité à provoquer l’assistance. Vêtu d’un costume cravate noir, il arborait un crâne rasé de façon à former un « Z », symbole utilisé par la Russie dans le cadre de son invasion de l’Ukraine. Il brandissait également une pancarte aux messages politiques, utilisant l’audience comme une tribune.
Son avocat, Øystein Storrvik, s’est toutefois félicité que le tribunal ait relevé des évolutions positives chez son client au fil des années. Selon lui, Breivik va dans un premier temps faire appel du rejet de sa demande de libération conditionnelle, même si la cour d’appel n’est pas contrainte d’examiner ce recours.
Une détention de longue durée
La peine de 21 ans de prison prononcée en 2012 à l’encontre de Breivik était à l’époque le maximum prévu par la loi norvégienne. Elle est assortie d’une période minimale de 10 ans et peut être prolongée indéfiniment tant que le condamné est jugé dangereux.
Le système judiciaire autorise Breivik à déposer une demande de libération conditionnelle chaque année une fois ce seuil des 10 ans franchi, ce qu’il n’a pas manqué de faire. Mais au vu de la décision rendue mercredi, et malgré les « évolutions positives » relevées, il semble peu probable que l’extrémiste puisse recouvrer la liberté dans un avenir proche.
La Norvège toujours marquée
Plus de 10 ans après les faits, la Norvège reste profondément marquée par ces attentats, les pires qu’ait connu le pays depuis la Seconde Guerre Mondiale. Les noms d’Utøya et de Breivik sont désormais tristement entrés dans l’Histoire.
Chaque année, des cérémonies sont organisées pour rendre hommage aux victimes et dire non à la haine et à la violence. L’émotion est toujours vive, les plaies peinent à se refermer. Et l’éventualité, même lointaine, d’une libération de Breivik ravive immanquablement la douleur et la peur.
La fermeté de la justice dans ce dossier est donc essentielle. Elle montre que la Norvège n’a pas oublié, et qu’elle entend bien faire en sorte que de tels actes ne se reproduisent plus. Car face à la barbarie, c’est l’État de droit qui doit triompher. En refusant la libération conditionnelle d’Anders Behring Breivik, les juges norvégiens ont envoyé un signal fort et nécessaire en ce sens.