La Guinée traverse une période politique tumultueuse depuis le coup d’État militaire de 2021 qui a porté la junte au pouvoir. Dans un nouveau rebondissement, le gouvernement vient d’ordonner la suspension des activités de tous les partis politiques ne disposant pas d’une autorisation administrative préalable. Cette décision controversée intervient alors que le pays est en pleine transition et que des élections sont promises pour cette année.
Un coup de semonce pour les partis politiques
Dans une déclaration choc lue à la télévision nationale, le ministre de l’Administration du territoire et de la décentralisation, Ibrahima Khalil Condé, a regretté « la prolifération des mouvements politiques sans autorisation administrative préalable ». En conséquence, il a sommé tous ces mouvements de cesser immédiatement leurs activités et de soumettre une demande d’autorisation auprès de son ministère pour pouvoir exister légalement.
Cette annonce a suscité l’inquiétude et la colère de l’opposition, qui y voit une nouvelle dérive autoritaire de la junte militaire. Trois jours plus tôt, une manifestation avait été organisée pour réclamer le départ des militaires du pouvoir et dénoncer leur gestion de plus en plus unilatérale des affaires du pays.
La promesse d’élections en 2025
Face aux pressions internationales, la junte s’était initialement engagée à rendre le pouvoir à des civils élus avant fin 2024, un délai qu’elle n’a finalement pas respecté. Lors de ses voeux du Nouvel An, le général Mamadi Doumbouya, chef de la junte, avait promis que 2025 serait « une année électorale cruciale pour parachever le retour à l’ordre constitutionnel ».
Le porte-parole du gouvernement, Ousmane Gaoual Diallo, a précisé sur RFI qu’une élection présidentielle et des législatives pourraient se tenir avant la fin de l’année, après l’adoption d’une nouvelle Constitution par référendum, « probablement en mai ». Mais l’opposition doute de la sincérité de ces promesses et craint que la junte ne cherche à se maintenir au pouvoir.
Des partis suspendus et des dirigeants en exil
Depuis son arrivée au pouvoir, la junte dit vouloir « assainir l’échiquier politique ». En octobre dernier, elle avait dissous 53 partis, suspendu 54 autres pour trois mois et placé « sous observation » 67 formations, dont les principaux partis d’opposition :
- Le Rassemblement du peuple de Guinée (RPG) de l’ancien président Alpha Condé, renversé par le coup d’État
- L’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG)
- L’Union des forces républicaines (UFR)
Les dirigeants de ces partis ont été contraints à l’exil. La junte a également demandé aux institutions nationales et internationales, ainsi qu’aux partenaires techniques et financiers, de cesser toute collaboration avec les 54 partis suspendus jusqu’au 31 janvier 2025.
Un avenir politique incertain
La suspension des partis sans autorisation administrative et les restrictions imposées à l’opposition font craindre une dérive autoritaire durable en Guinée. Malgré les promesses d’élections, beaucoup doutent de la volonté réelle de la junte de rendre le pouvoir aux civils.
La situation politique en Guinée est plus que jamais incertaine et tendue. La communauté internationale doit rester vigilante et maintenir la pression sur la junte pour garantir une véritable transition démocratique.
Un diplomate occidental en poste à Conakry
Les prochains mois seront décisifs pour l’avenir de la Guinée. Entre promesses électorales, suspensions de partis et répression de l’opposition, le pays est à la croisée des chemins. La société civile et la communauté internationale devront redoubler d’efforts pour accompagner le retour à l’ordre constitutionnel et éviter tout dérapage.