Nouvelle polémique pour le gouvernement Bayrou. Quelques jours seulement après le passage dévastateur du cyclone Chido sur l’archipel de Mayotte, les propos du ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau soulèvent une vive controverse. En appelant à « traiter avec la plus grande détermination la question migratoire » en parallèle de la reconstruction post-cyclone, il s’est attiré les foudres de l’opposition de gauche.
Retailleau lie reconstruction et lutte contre l’immigration clandestine
Sur le réseau social X (anciennement Twitter), le ministre de l’Intérieur a affirmé qu’on « ne pourra pas reconstruire Mayotte sans traiter la question migratoire ». Un discours qu’il a réitéré le lendemain matin sur RMC, accusant les autorités comoriennes de pousser des populations vers Mayotte pour « susciter une sorte d’occupation clandestine ».
Pour Bruno Retailleau, cette pression migratoire, issue majoritairement des Comores voisines, serait à l’origine de nombreux problèmes à Mayotte :
- Saturation des écoles et hôpitaux
- Pénurie d’eau potable
- Insécurité grandissante
- Développement incontrôlé d’habitats précaires, particulièrement vulnérables aux aléas climatiques
Mayotte compte en effet près de 48% d’immigrés clandestins parmi sa population. Une situation explosive selon le ministre, qui compare : « C’est comme si en France métropolitaine, nous avions 20 millions de clandestins ».
Indignation de la gauche, qui dénonce des « propos xénophobes »
Ces prises de position, quelques jours seulement après le drame, ont suscité la colère de nombreux responsables de gauche. Le premier secrétaire du PS Olivier Faure a fustigé sur X un « obsessionnel indécent », jugeant que « le temps est au recueillement quand tout n’est que désolation ».
De son côté, la présidente du groupe LFI à l’Assemblée Mathilde Panot dénonce des « propos xénophobes » et accuse le ministre de « sombrer dans la pure ignominie ». François Ruffin ironise lui aussi : « Les cyclones à Mayotte seraient maintenant la faute des migrants… ».
Un peu de dignité, Monsieur Retailleau. Le temps de la tragédie, au moins, vous pouvez oublier votre petite tactique de division de la Nation.
François Ruffin, député LFI
François Hollande reconnaît un problème migratoire, sans solution miracle
Un député de gauche admet cependant l’urgence de régler le problème de l’immigration clandestine à Mayotte. François Hollande, qui s’y était rendu en tant que président en 2014, affirme : « On sait bien qu’il fait mieux vivre à Mayotte que dans les Comores ». Mais l’ancien chef d’État, qui n’était pas parvenu à endiguer les arrivées massives, se montre fataliste : « Comment régler cela ? On a mis des bateaux pour empêcher les barques de venir à Mayotte mais c’est un flux continu. »
Au RN, quelques soutiens à Retailleau
Si la majorité gouvernementale est restée discrète, quelques voix se sont élevées au RN pour appuyer les propos du ministre de l’Intérieur. « Vous ne pouvez pas avoir le double de population que ce que vous devriez avoir sur un territoire. Cela ne fonctionne pas », a affirmé la députée du Var Laure Lavalette sur France Inter.
Sur X, elle ajoute : « Demain, il faudra reconstruire sur des bases saines un département qui subit ce qu’on accepterait nulle part ailleurs. » Un soutien sans ambiguïté à la position de fermeté du ministre Retailleau dans ce dossier brûlant.
La polémique révèle les failles d’un département en crise
Au-delà de la joute politique, cette polémique met en lumière la situation particulièrement précaire de Mayotte, 101e département français. L’archipel, déjà en proie à de graves difficultés socio-économiques et sécuritaires, doit maintenant affronter les conséquences dramatiques du cyclone Chido.
Une reconstruction d’ampleur s’annonce, alors que les services publics sont déjà exsangues, submergés par une démographie galopante liée en grande partie à l’immigration comorienne. Dans ce contexte, la question migratoire et la gestion des flux en provenance de l’archipel voisin s’imposent comme des enjeux cruciaux pour l’avenir de Mayotte.
Mais pour l’opposition de gauche, lier explicitement les deux problématiques à ce stade relève de la pure « instrumentalisation » politique voire de la « xénophobie », quelques jours seulement après le passage dévastateur de Chido. Une polémique qui ne fait sans doute que commencer et qui illustre les profonds clivages sur ce dossier sensible.