Aux États-Unis, une frustration grandissante s’empare des électeurs autochtones, qui se sentent ignorés par les candidats lors de l’élection présidentielle. Pourtant, leur poids électoral pourrait faire la différence dans certains États clés.
Un sentiment d’exclusion malgré un droit de vote chèrement acquis
Pour Caiden John, jeune électeur de 18 ans issu de la nation païute Pyramid Lake dans le Nevada, cette première participation à une présidentielle a un goût amer. Ses ancêtres ont longtemps été privés de ce droit civique et il déplore le manque de considération des candidats envers sa communauté. “Malheureusement, je ne sais pas s’ils nous prêtent réellement attention”, confie-t-il. “Nous sommes toujours la plus petite minorité de notre pays.”
Un siècle après avoir obtenu la citoyenneté américaine, beaucoup d’Amérindiens ont le sentiment d’être exclus des débats politiques. Leurs problèmes spécifiques sont ignorés et aucun des deux grands candidats n’a pris la peine de se rendre dans une communauté autochtone. Un choix étonnant quand on sait que cette population représente bien plus que les 33.500 voix d’avance de Joe Biden sur Donald Trump dans le Nevada en 2020.
60.000 voix autochtones en jeu dans le Nevada
“Le vote autochtone au Nevada, c’est 60.000 voix, vous les voulez ou pas ?”, interpelle Elveda Martinez, activiste de 65 ans originaire de la nation Walker River. “Parce que si vous les voulez, vous avez intérêt à vous rendre dans une réserve et à dire ‘me voilà'”, lance-t-elle, rappelant que le vote anticipé a déjà commencé.
Des excuses historiques qui ne suffisent pas
Si la récente visite de Joe Biden auprès de la communauté Gila River en Arizona et ses excuses pour les atrocités subies par les enfants autochtones dans les pensionnats ont marqué les esprits, beaucoup estiment que cela ne suffira pas à apaiser la frustration. Le président a qualifié ces placements forcés, qui ont perduré jusque dans les années 1970, de “péché qui entache notre âme”. L’objectif de ces établissements était d’effacer la culture et l’identité des premiers occupants du territoire américain dans un but d’assimilation.
Un soutien électoral qui s’étiole
Malgré la nomination historique de Deb Haaland, première autochtone à occuper le poste de ministre de l’Intérieur, le Parti démocrate ne peut plus compter sur un soutien sans faille de ces populations selon Elveda Martinez. “Nous avons toujours voté en bloc pour les démocrates ici mais cela a changé au cours des quatre dernières années”, affirme-t-elle, estimant la répartition actuelle à 65% pour les démocrates et 35% pour les républicains dans sa communauté.
Si elle reste hostile à Donald Trump, elle admet que l’inflation galopante sous l’administration Biden pousse certains membres de sa communauté à envisager de voter républicain. “Les gens doivent parcourir 50 kilomètres pour aller au supermarché et ils reviennent avec pas grand-chose”, décrit-elle. Un constat qui pourrait bien profiter à l’ancien président lors du scrutin.
Face à ces défis, il est urgent pour les candidats de prendre en compte les revendications des électeurs autochtones. Leur poids électoral non négligeable pourrait faire basculer le résultat dans certains États clés. Au-delà des promesses de campagne, c’est un véritable changement de regard sur ces communautés qui est attendu. Le chemin vers une réelle inclusion politique des premiers occupants du territoire américain reste encore long.