La crise politique qui secoue actuellement la Nouvelle-Calédonie risque de porter un coup sévère à la stratégie indo-pacifique de la France, patiemment élaborée ces dernières années. Cet archipel du Pacifique sud, véritable joyau de la présence française outre-mer, se retrouve au cœur d’enjeux géostratégiques majeurs qui opposent les grandes puissances régionales et mondiales.
La Nouvelle-Calédonie, pilier de l’influence française dans le Pacifique
Depuis 2018, le président Emmanuel Macron a fait de l’Indo-Pacifique une priorité de sa diplomatie, avec l’ambition de positionner la France comme une alternative crédible face à la montée en puissance de la Chine et aux tensions croissantes avec les États-Unis. Et la Nouvelle-Calédonie occupe une place centrale dans ce dispositif :
Je veux faire de la Nouvelle-Calédonie une puissance océanienne ainsi qu’un levier de rayonnement international et indo-pacifique de la France.
Emmanuel Macron, lors de sa visite dans l’archipel en 2018
Le chef de l’État a multiplié les déplacements dans la région, du Vanuatu où il a dénoncé le “nouvel impérialisme” de la Chine en juillet 2023, à la Papouasie-Nouvelle-Guinée. Mais les événements récents en Nouvelle-Calédonie menacent de fragiliser cet édifice diplomatique.
Un statut contesté, des institutions bloquées
Le report du Congrès devant traiter de la sortie de l’accord de Nouméa et de l’avenir institutionnel de l’archipel a ravivé les tensions entre loyalistes et indépendantistes. Ces derniers contestent la légitimité de l’État à organiser unilatéralement la consultation, après le rejet de l’indépendance lors des trois référendums. Une crise politique et institutionnelle s’est ouverte, avec le blocage des institutions et un dialogue difficile entre les parties. Une situation qui inquiète Paris, soucieux de préserver la stabilité et son influence dans un territoire hautement stratégique.
L’équation calédonienne au cœur du grand jeu des puissances
Car au-delà des enjeux internes, c’est bien la place de la France dans le Pacifique et sa capacité à peser face aux appétits chinois qui est en jeu. Pékin observe avec intérêt la situation, espérant profiter d’un affaiblissement de Paris pour étendre son influence dans une région névralgique. Les États-Unis sont également très attentifs à l’évolution du dossier calédonien, alors que la rivalité avec la Chine s’intensifie dans la zone. Washington compte sur une présence française forte pour contrebalancer les ambitions de Pékin.
Face à ces défis, la France doit impérativement trouver une issue à la crise calédonienne si elle veut préserver son rôle de puissance d’équilibre dans l’Indo-Pacifique. Un chemin étroit et semé d’embûches, mais indispensable pour ne pas voir sa stratégie régionale durablement compromise.
