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La France Rétrocède Une Base Militaire Au Tchad

La France vient de rétrocéder sa première base militaire au Tchad, à Faya dans le nord désertique du pays. Cette étape marque la fin d'une présence militaire française de plus de 60 ans, suite à la décision surprise du Tchad de suspendre les accords de défense qui le liaient à son ancien colonisateur. Que signifie ce retrait pour l'avenir des relations franco-tchadiennes ?

Un événement historique vient de se produire dans les relations franco-tchadiennes : pour la première fois, la France a rétrocédé l’une de ses bases militaires au Tchad. Située à Faya, dans l’extrême nord désertique du pays, cette base a été remise aux forces armées tchadiennes ce jeudi, selon un communiqué du ministère tchadien des Armées. Cette rétrocession intervient moins d’un mois après l’annonce surprise par N’Djamena de la suspension de l’accord militaire qui liait les deux pays depuis l’indépendance du Tchad en 1960.

La fin d’une présence militaire française permanente

Le départ des troupes françaises de Faya marque une étape symbolique majeure. En effet, cette base dans le nord du Tchad était un point d’ancrage stratégique pour l’armée française depuis des décennies. D’après une source proche du dossier, une trentaine de militaires français y étaient encore stationnés récemment, apportant notamment une aide médicale à la population locale. L’aéroport de Faya servait aussi de point de départ pour des opérations militaires conjointes avec l’armée tchadienne dans le nord du pays.

Mais ce jeudi, les troupes françaises ont définitivement plié bagage. Selon le ministère tchadien des Armées, 54 véhicules ont pris la route en convoi vers la capitale N’Djamena, tandis qu’un avion cargo Antonov a décollé avec plus de 80 tonnes de fret à son bord. La rétrocession de Faya sera suivie dans les prochaines semaines par celles des bases d’Abéché puis de N’Djamena, mettant ainsi un terme à plus de 60 ans de présence militaire française permanente au Tchad.

Un lieu chargé d’histoire

Au-delà de sa valeur stratégique contemporaine, Faya est un lieu chargé d’histoire dans les relations franco-tchadiennes. Située près des monts du Tibesti, cette oasis saharienne fut un enjeu de la Seconde Guerre mondiale. C’est de là que partit en 1941 la colonne du colonel Leclerc pour aller prendre l’oasis libyenne de Koufra, où il prononça son célèbre serment de ne déposer les armes que lorsque le drapeau français flotterait à Strasbourg.

Dans les années 1970 et 1980, Faya fut plusieurs fois occupée par les troupes libyennes qui soutenaient alors des rebelles hostiles au pouvoir tchadien. La base fut finalement reprise en 1987 par les forces tchadiennes avec l’appui militaire français. Depuis, un détachement français y était stationné de manière permanente, impliqué notamment dans les opérations anti-terroristes au Sahel.

La fin d’une époque dans les relations franco-tchadiennes

Pour de nombreux observateurs, la rétrocession de la base de Faya et le retrait militaire français qui s’amorce marquent la fin d’une époque dans les relations entre Paris et N’Djamena. Depuis l’indépendance, la France a été le principal soutien du régime tchadien, notamment lors des offensives rebelles en 2008 et 2019. Mais depuis l’arrivée au pouvoir en 2021 de Mahamat Idriss Déby, fils de l’ancien président Idriss Déby tué au combat, le Tchad semble vouloir prendre ses distances.

Pour le président tchadien, les accords militaires avec la France étaient devenus « obsolètes » et ne répondaient plus « aux réalités politiques et géostratégiques de notre temps ». Un coup dur pour Paris, qui voit s’effriter son influence dans une région où sa présence militaire était jusqu’ici incontournable.

Selon des sources diplomatiques, cette décision tchadienne s’inscrit dans un contexte de remise en cause plus large de la présence militaire française en Afrique. Entre 2022 et 2023, quatre autres pays – le Mali, le Burkina Faso, la Centrafrique et le Niger – ont demandé le départ des troupes françaises de leur sol. Paris, qui a officiellement mis fin à son opération anti-terroriste Barkhane dans le Sahel fin 2022, cherche désormais à redéfinir ses partenariats militaires sur le continent.

Le départ de Faya ouvre donc une nouvelle page, encore incertaine, dans les relations entre la France et le Tchad, son plus ancien allié militaire en Afrique. Si Paris assure vouloir maintenir une « relation bilatérale rénovée » avec N’Djamena, l’avenir de ce partenariat stratégique semble plus que jamais en question. La rétrocession des dernières bases françaises dans les prochaines semaines permettra d’en prendre la mesure.

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